La véritable consolation

En ce mois décembre un peu frisquet, la liturgie nous offre une drôle de figure plus proche de l’homme de cro-magnon que du Melunois du 21ème siècle. Il n’est pas vêtu d’un « slip en peau de bison » pour reprendre la chanson célèbre, mais de « poils de chameau » et son menu a tout d’un festin à la Koh-Lanta :  sauterelles et miel sauvage. Et, sommet de l’étrange, il s’époumone à travers le désert … est-ce bien raisonnable ? Après tout, on n’a jamais vu les dunes de sables se convertir…

Jean-Baptiste en réalité est l’archétype de la figure du prophète : le messager de Dieu qui interpelle le peuple pour l’inviter à changer de vie. Pour marquer les esprits, Dieu frappe un grand coup, au point que Jean-Baptiste est appelé dans la liturgie « le plus grands des enfants des hommes ».

Finalement, les publicitaires d’aujourd’hui n’ont rien inventé : un message décalé qui interpelle pour inviter à faire quelque chose. Ici, nulle question de publicité mais d’une bonne nouvelle. L’arrivée d’une super star, non pas un nouveau Johnny Hallyday mais plutôt celui qui pourra vraiment consoler le peuple d’Israël. Car au moment où surgit Jean-Baptiste, l’ambiance n’est pas au beau fixe en Israël : l’occupation romaine a succédé à l’occupation grecque, le pays est divisé sur fond de crise religieuse et la vertu n’est pas forcément au rendez-vous.

L’urgence de la conversion

Mais au fait, quel est le message essentiel de Jean-Baptiste ? Est-il seulement l’icône des nouveaux adeptes du bio-bobo ? Il nous dit surtout « convertissez-vous ». Se convertir ? qu’est-ce à dire ?

Dans l’Evangile d’aujourd’hui, la conversion prend la forme d’un choc de simplification. Ici point question d’impôt ou d’administration mais de la simplification de nos vies. «  Tracer une route aplanie pour le Seigneur ». Je ne sais pas si vous êtes déjà allés à Chamonix mais la construction de l’autoroute blanche a provoqué un grand changement : d’un coup la vallée encaissée devenait accessible facilement, plus besoin de prendre des risques avec des routes longues et tortueuses.

La conversion que nous propose Jean-Baptiste est du même ordre : laisser la place de créer une autoroute pour le Seigneur, un boulevard. Comment faire ? La prière d’ouverture nous le disait : « ne laisse pas le souci de nos tâches présentes entraver notre marche à la rencontre de ton fils »… le souci des tâches présentes. Voici un sujet de conversion. Jean-Baptiste nous annonce que nos préoccupations du siècle ne pèsent pas grand chose en lieu et place de l’arrivée du Christ et que notre travail de conversion consiste d’abord à éliminer des choses futiles ou celles qui nous détournent du Christ. Aplanir les montagnes, combler les ravins c’est cela : préparer dans mon cœur un chemin au Seigneur. En ce dimanche, quelle colline vais-je essayer d’abattre ? quel ravin vais-je combler ?

La conversion est la vraie consolation

Lorsque l’on parle de conversion, de changer de vie, les paroissiens se disent allez, çà y est, on est parti pour le refrain du carême… plus besoin d’écouter. Car on voit la conversion comme quelque chose de triste et de pénible. On image des efforts terrifiants comme dans le film Da Vinci Code où le « pseudo moine » se flagelle le dos. Et pourtant les lectures de ce jour qui nous parlent bel et bien de conversion nous invitent à une conversion joyeuse : « Consolez, consolez mon peuple dit votre Dieu », « ce qui est attendu c’est un ciel nouveau et une terre nouvelle ». « il vient avec puissance son bras est victorieux ». Il me semble que la vraie conversion, frères et sœurs biens aimés est un chemin de joie. Lorsque je confesse, je suis émerveillé par la joie profonde qui habite le pénitent quand il entend les paroles de l’absolution « Que Dieu notre Père vous montre sa miséricorde ». Car celui qui vient se confesser vient précisément pour changer de vie. Nous avons tous dans notre vie des choses qui nous appesantissent, des traits de caractères, des mauvaises habitudes, des péchés récurrents qui nous minent petit à petit. Le temps est venu, frères et sœurs biens aimés, de vraiment préparer notre cœur à la venue du Seigneur.

Pour être une vraie consolation, ce mouvement de conversion doit être double : il y a un travail de notre part « aplanissez la route » autrement dit, il y a des choses à retirer, des choses à changer, une décision à prendre. Depuis 1 semaine, qu’ai-je-fait dans ma vie pour préparer mon âme à Noël ? Et c’est une décision que Dieu attend « c’est pour vous qu’il patiente … car il veut que tous aient le temps de se convertir ». Cette semaine, quelle action concrète dois-je changer dans ma vie ?

Mais il y a surtout un laisser faire : la consolation c’est que, dans la vie chrétienne, le boulot dépend un peu de moi et beaucoup de Dieu. C’est lui qui « conduit son troupeau » « qui rassemble ses agneaux et les porte sur son cœur ». C’est lui qui nous promet « un ciel nouveau », c’est lui qui vient « victorieux », c’est lui qui donne la vraie consolation.

En me convertissant, c’est à dire en rendant ma vie plus conforme à l’Evangile, je goûte à une joie dont l’Ecriture dit que « rien pas même la mort ne pourra nous ravir ». Une consolation qui n’est pas un bonbon sucré devant la télé mais un ancrage profond au milieu des tempêtes. Il est une bonne nouvelle en ce jour : le Seigneur veut nous consoler, le Seigneur veut nous donner la joie véritable, le Seigneur veut nous permettre d’emprunter une autoroute bien plate pour aller jusqu’à lui. Le Seigneur veut nous donner la paix véritable. Il nous dit simplement en ce matin, consens, décide, change… commence le mouvement je ferai le reste. Le premier effort est pour nous, la suite il s’en chargera.

Alors Seigneur en ce jour ouvre nos cœurs, vient nous donner la force d’entrer vraiment dans l’Avent, de choisir de nous convertir. Donne moi la force de choisir un point d’effort pour cette semaine pour goûter à la joie d’une vie plus unie avec toi.

 

Amen.