Vigilance fraternelle

Nous sommes au cœur d’un grand jeu scout dans la forêt de Fontainebleau et l’objectif du jeu est d’arriver à obtenir le Saint Graal . La patrouille du Cormoran est en embuscade  elle doit interpeller celle du Milan Royal qui arrive. Soudain le plus petit de la patrouille, Jean aperçoit le long du chemin un des membres du Cormoran qui s’était mal placé et cri à toute sa patrouille : attention ! une embuscade. Faisant ainsi il rend un service à toute sa patrouille qui peut alors défendre son trophée. Le petit Jean a eu une véritable vigilance fraternelle. Et c’est un peu à cela que nous invite Jésus aujourd’hui dans l’ordre spirituel. Il va sans dire qu’il nous est très naturel de prevenir notre ami lorsque la voiture risque de partir dans le fossé… mais cela nous est il autant naturel lorsque qu’il est question du salut de l’âme de nos frères.

La conscience du salut des autres

En  fait Jésus dans cet Evangile nous dit bien qu’on se ne sauve pas tout seul que l’on est pas chrétien tout seul. Je ne sais pas si vous l’avez remarquez mais la liturgie parle très souvent des « frères », au même titre que Saint Paul commençait la seconde lecture en disant « frères »… être frère implique d’abord une proximité. Je me réjouis que les scouts et guides soient présent en ce jour au cœur de la paroisse. A travers l’expérience de votre fraternité, de votre amitié se développe petit à petit la conscience que je ne peux pas marcher seul. Une patrouille à laquelle il manque 3 membres est un peu bancale… vous le savez bien ! Comment construire la tente si la moitié des effectifs manques à l’appel ?

Et bien notre vie chrétienne n’est pas une solitude. Dans notre société nous avons tous tendance, plus ou moins à nous prendre pour le seul point de référence, y compris dans la vie spirituelle. Que de fois j’entend : « ah mon père, vous savez c’est son choix… il faut bien qu’il fasse ses expériences… » ou encore « mon père, non mais les enfants du voisins ne vont plus à la messe mais après tout tant que les miens y vont… ce n’est pas grave »…

Les grands saints de la tradition de l’Eglise eux avaient une vive conscience que nous sommes tous responsable devant le Christ les uns des autres. Saint Dominique avait pour slogan « mon Dieu, ma miséricorde, que vont devenir les pécheurs ». Saint François-Xavier qui s’inquiétait de voir tant d’âme se perdre car ils ne connaissent pas Jésus ou bien qu’ils ne vivent pas de l’Evangile. Ce dimanche Jésus  nous invite à avoir cette même attention : tu es responsable de ton frère. Si le petit cul de pat n’avait pas prevenu sa patrouille… celle ci serait tombé dans le piège…  et le véritable piège pour nous chrétien c’est le péché.

La correction fraternelle

Nous devons bien reconnaître qu’il est facile de nous indigner, de nous scandaliser, de reprocher et de répandre aux quatre vents les fautes du prochain. « Madame bidule… ah vraiment elle est blessante avec madame untel »… « le CP du Cormoran est vraiment dur avec son cul de pat… ». Mais il nous est difficile d’aller voir notre frère, en frère, pour le corriger selon la méthode et l’esprit que Jésus nous propose dans l’évangile. On se dit : ce n’est pas à moi de lui dire… ou encore je ne veux pas de problème. C’est d’ailleurs en sommes ce que dit Caien après avoir tué son frère dans la Genèse : « suis je le gardien de mon frère ? ». Jésus nous répond dans l’Evangile oui ! et il nous donne le chemin à suivre pour aimer d’un amour véritable : la vigilance et la correction fraternelle.

Je crois que le mot le plus important c’est « fraternel » cela veut dire qu’elle implique une certaine égalité. Jésus ne nous demande pas d’être des redresseurs de tord. Des élèves qui se prennent pour le professeur et qui corrige vertement leur ainé en public pour se mettre sur une piedestal « moi je sais… et toi tu ne sais pas »… certainement pas. Etre frère indique aussi que je suis moi même touché par le péché. Je ne suis pas parfait, je peux moi même tomber et j’ai conscience que tout seul je n’arrive pas à avancer et que à mon tour j’aurai besoin d’être corrigé à un moment ou à un autre. Je reste humble sur ce chemin car je sais qu’il me faut beaucoup regardé la poutre qui est dans mon œil plutôt que de regarder la paille dans celui de mon voisin.

Fraternel veut dire aussi un certain lien avec l’autre. Nous sommes tous les deux le passager d’un même bateau : si l’un flanche, l’autre flanchera aussi. Accéder au ciel ce n’est pas passer le concours des officiers de la gendarmerie ou celui de l’ENA… « Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité ». Il y a donc une véritable solidarité mutuelle. Dans l’Evangile Jésus s’attaque beaucoup aux pharisiens présisement car ils ne se préoccupent que de leur petites affaires personnelles et qu’ils oublient le bien et le salut des autres.

Alors concrètement comment faire ?

Il nous faut d’abord cultiver la douceur. Souvent nous voulons faire une remarque parce que quelque chose nous agace. Par exemple au bureau Thomas ne range jamais sa tasse de café… et cela énerve profondément Capucine… tant que Capucine sera enervé, et sera sous l’emprise de la colère, elle ne dira rien de constructif à Thomas. La correction fraternelle exige en effet d’abord la douceur. Et Jésus dans l’Evangile nous le montre bien : il nous dit : « Si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute. S’il t’écoute, tu auras gagné ton frère » il ne nous dit pas : « pend le haut et cours jusqu’à ce qu’il ait expié toute sa faute… » Dans l’Evangile Jésus nous le montre, prenez la samaritaine au moment de sa rencontre avec Jésus elle n’a pas une vie au top… et pourtant Jésus la fait avancer avec douceur.

Il faut vouloir faire grandir l’autre. Quand je fais une remarque à quelqu’un que ce ne soit pas pour satisfaire ma propre personne mais plus pour que l’autre soit meilleur. Et en cela le ton est très important, il n’est pas pareil de dire à propos d’une même chose : « tu es mauvais la dessus » ou « je pense que si tu faisais cela tu pourrais avancer ». En fait ce que Jésus nous propose c’est de nous unir à l’autre pour l’aider à avancer.

L’amitié véritable

Je crois que l’enjeux de cet Evangile c’est tout simplement l’amitié véritable. Souvent je remarque que les jeunes sont paumés dans la distinction entre pote, copain, ami, frère. Je crois qu’un ami c’est précisement celui qui peut venir faire moi en me disant « je te dis que tu déconne… tu vois là dans ton travail tu n’as pas une bonne attitude vis à vis de untel ». « Depuis 3 mois tu ne pense que à Germaine et tu ne travail plus tes maths… comment auras tu ton brevet à la fin de l’année ». L’amitié véritable est exigeante c’est une exigence mutuelle car je veux le vrai bien de l’autre : je veux que l’autre devienne meilleur, je veux qu’il soit un meilleur scout, une meilleure guide, un meilleur parent, un meilleur chrétien. L’amitié c’est cette qualité de relation où mutuellement l’on peut s’aider à grandir avec douceur, bienvaillance et exigence. Le livre du Siracide dans la Bible en parle de manière magnifique qui peut nous parler à tout âge  :« Un ami fidèle est un refuge assuré,celui qui en trouve un a trouvé un trésor. Un ami fidèle n’a pas de prix,sa valeur est inestimable. Un ami fidèle est un élixir de vie que découvriront ceux qui craignent le Seigneur. Celui qui craint le Seigneur orientera bien ses amitiés,car son compagnon lui ressemblera. »

Puissions nous en ce dimanche, prendre conscience d’abord que nous sommes tous responsables du salut de nos frères et demander ensuite la grâce au Seigneur de vivre ensemble, dans la paroisse, dans la famille, dans le scoutisme, des amitiés exigeantes qui nous aide à grandir dans la sainteté !

Amen !