Je me suis fait serviteur de tous ! [Solennité de St Sulpice]

Il faut avouer une chose, c’est que quand vous tapez Saint Sulpice dans la barre Google, vous avez plus de chance de trouver des informations concernant notre belle église et notre paroisse… que concernant son Saint Patron. Car voilà un saint bien discret. Sa notice biographique tenant sur moins d’une page, je souhaite bon courage à qui voudrait écrire un livre entier sur « Sulpice le pieux », archevêque de Bourges qui mourut le 17 janvier 647, il y a maintenant 1375 ans ! Nous pourrions nous contenter d’une pieuse révérence, en nous disant qu’il n’avait rien de commun avec nous et qu’il n’a donc rien à nous enseigner. Et pourtant les lectures de la fête d’aujourd’hui nous donnent de nombreuses pistes pour suivre les traces de ce beau Saint Patron !

Avec Sulpice : se mettre au service les uns des autres ?

« Libre à l’égard de tous, je me suis fait le serviteur de tous » nous dit saint Paul dans la seconde lecture. Voilà peut-être le mot d’ordre de l’évêque saint Sulpice : « être serviteur de tous ». Tour à tour page, exploitant agricole, archidiacre, gérant de la maison de l’évêque, responsable de l’assistance des pauvres, il s’est toujours mis au service des autres. En fait, il a pris au sérieux le modèle du Bon Pasteur. C’est-à-dire du Christ : donner sa vie pour ses brebis. Pour le berger, les brebis sont toute sa vie. Si une brebis est perdue ou malade, cela l’angoisse, le préoccupe, il cherche des solutions. Pour le bon pasteur il n’y a pas de 35h et de « on verra lundi si j’y suis ». De la même manière, frères et sœurs, pour un chrétien qui se met à l’école de saint Sulpice, la charité n’a pas de limite prédéfinie. 

Car le fait d’être bon pasteur n’est pas réservé à un lointain évêque de Bourges et à Jésus. Cela nous concerne tous ! Nul besoin d’avoir une mitre sur la tête pour avoir le souci du bien du peuple de Dieu ! Avons-nous pour cela la conscience d’appartenir à une paroisse ? À un peuple particulier ? Ou bien sommes-nous juste des consommateurs d’une prestation de service plus ou moins bien rendu par des acteurs de plus ou moins bonne qualité ? 

La pandémie qui nous maltraite depuis des mois a une conséquence désastreuse sur notre fraternité chrétienne et missionnaire. Dans le métro et les transports, on se méfie de son voisin ; à l’école et ailleurs on teste à tout rompre, on s’isole, on prend des mesures de distanciation par peur, par crainte. Mais cher amis, au cœur de ce marasme, est-ce que nous prenons soin les uns des autres, dans notre communauté paroissiale ? Est-ce qu’on prend le temps de se parler, de se rencontrer ? Ou bien fuit-on aussitôt la communion terminée pour retourner à son poulet rôti ? 

Frère et sœurs, à la suite du Christ nous devons être bon pasteur les uns des autres. La paroisse doit être une famille où chacun trouve sa place, où nous devons prendre soin les uns des autres, non pas comme des parents autoritaires, mais comme des comme des frères et sœurs aimants !

Avec saint Sulpice, être connu de Dieu 

Il y a quelques années, j’avais participé en tant qu’étudiant à un concours de théologie dont le thème était : « peut-on être saint sans connaître le Christ » ? J’avais produit à l’époque un petit papier dont j’étais fier mais qui était finalement assez classique. Un peu vexé de mon échec, j’ai consulté la « copie » du vainqueur. Il avait traité le sujet en l’inversant : « Peut-on être saint sans être connu du Christ ? ». Eh bien la réponse est non car « le bon pasteur connait ses brebis ». Saint Sulpice n’a pas été saint par lui-même. Il est saint parce qu’il est connu et aimé de Jésus. Il a fait la joie de Dieu. Le fêter, c’est aussi prendre conscience pour nous-mêmes que nous sommes connus et aimés de Dieu, personnellement, spécifiquement. À chacun de nous le bon pasteur dit : « Matthieu, Claire, Florence, Louis, Jean-Paul, François, Marie, Thérèse, Henri… tu as du prix à mes yeux et je t’aime ». 

Mais ne nous méprenons pas : être connu de Dieu ne veut pas dire être fliqué par Dieu à la manière de la Stasi ou du KGB. Cela veut dire qu’il connait le tréfonds de notre cœur, nos aspirations secrètes, nos désirs de faire le bien et de grandir, nos combats intérieurs souvent secrets, nos angoisses et nos joies. Il est vraiment l’Emmanuel, Dieu avec nous. Il est le véritable bon pasteur qui accompagne son peuple dans son parcours de vie, qui donne la nourriture par l’Eucharistie et la Parole de Dieu.

Avec saint Sulpice, annoncer l’Évangile

« Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Évangile », dit saint Paul dans la seconde lecture. Et c’était le souci constant de Sulpice dans une époque troublée, dans un monde en ruines. Un monde qui vivait dans une grandeur passée, celle d’un monde romain à peine effondré. Il a dû souvent parcourir son diocèse de Bourges pour annoncer l’Évangile à temps et à contre temps. De grâce, de grâce, cessons de croire qu’au Moyen âge c’était facile d’évangéliser. Pas plus qu’aujourd’hui. Et ce n’est pas parce que les gens allaient à la messe qu’ils étaient évangélisés en profondeur. Depuis notre baptême, nous sommes consacrés. Nous sommes prêtres, prophètes et rois ! Nous sommes donc appelés à l’annonce de l’Évangile. C’était ce que nous célébrions la semaine dernière : notre grandeur de baptisés à la suite du Christ premier baptisé. Je ne vous dis pas que tout le monde doit aller prendre une caisse dans le métro parisien et prêcher en aboyant la bonne parole… Je ne dis pas non plus qu’il ne faut pas le faire. L’Évangélisation c’est l’affaire de TOUS les baptisés, sans exception. Si le Christ nourrit vraiment ma vie, si le Christ est le centre de ma vie et me comble de sa joie, si la parole de Dieu me donne une joie profonde… alors nécessairement je ne peux pas être égoïste, je dois le partager. Je dois demander en l’Esprit Saint de quelle manière, différente de mon voisin, je vais annoncer l’Évangile. « J’ai encore d’autre brebis qui ne sont pas encore dans cette bergerie : celles-là aussi il faut que je les conduise. ». 

Ainsi donc, en ce dimanche de fête pour notre paroisse, que saint Sulpice intercède pour nous. Qu’il nous donne de nous mettre vraiment au service les uns des autres pour former une vraie communauté paroissiale aimante et chaleureuse, qu’il nous aide à prendre conscience que le Christ nous aime et non connait, enfin, que son exemple d’évangélisateur zélé nous aide à annoncer l’Évangile à notre tour. Saint Sulpice ! Priez pour nous !