Bonne nouvelle du mariage !
Quand on entend parler d’amour au café de la Mairie, en face de l’église, il y a ceux qui chantent en chœur avec Céline Dion : « S’il suffisait qu’on s’aime, s’il suffisait d’aimer… » ou avec Jacques Brel « Quand on a que l’amour à offrir en partage, au temps du grand voyage qu’est notre grand amour ». Il y a aussi ce groupe de jeunes gens fascinés par le grand et fort Daniel Craig, qui défendent leur conception très « James Bond » de l’amour : « beaucoup de charme, une grande passion charnelle, mais point d’attache »… Parce que franchement, chers amis, la conception de Jésus et du mariage est franchement désuète. Complètement dépassée dans une société moderne. C’est bon pour les contes de Walt Disney : « Ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants ». De nos jours, il faut être libre sur ces choses-là. « Mon Père, tant qu’on s’aime, y a pas de mal à s’faire du bien » « Comment peut-on parler de Bonne Nouvelle quand justement Jésus vous dit « pas de divorce, pas le droit à l’erreur, si tu te plantes sois malheureux et tais-toi » ». Et puis franchement, qu’est-ce que Jésus célibataire et ses curés célibataires qui dans l’Histoire n’ont pas toujours été des modèles de vertus peuvent bien nous dire sur le mariage ???
Frères et sœurs bien aimés, voilà une question fort intéressante : l’Évangile d’aujourd’hui constitue-t-il une bonne nouvelle ? D’autant que les statistiques sont formelles : « Un mariage sur deux ne dure pas plus de 9 ans… » La dureté des exigences de Jésus ne vient-elle pas les culpabiliser et, en écartant les divorcés remariés de la communion eucharistique, les mettre à l’écart de la miséricorde de Dieu ?
La bonne nouvelle du projet de Dieu
La première bonne nouvelle du mariage chrétien révélé par cet Évangile, c’est que le mariage est un chemin ordinaire et joyeux, le chemin « normal » d’une vie réussie : le chemin qui conduit l’homme à la pleine réalisation de ce qu’il est. Et c’est pourquoi Jésus revient à l’intention originelle du Créateur, que nous avons entendue dans la première lecture : « Il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un ». La vocation au mariage est voulue par Dieu. Elle est bonne et belle. Grande, féconde. Saint Jean-Paul II, quand il était pape, nous a tellement aidés à entrer dans la sainteté d’un tel mystère.
La vocation au mariage est aussi assumée dans toute l’Histoire sainte. Qui donc a conduit Adam vers Ève pour qu’il constitue le premier couple de l’Histoire sainte ? Qui a conduit Abraham vers Sarah, Isaac vers Rebecca, Juda vers Tamar, Tobie vers Sara , Ruth vers Booz… sinon Dieu lui-même ? Et qui aujourd’hui, par des chemins connus de lui seul, conduit l’homme vers la femme et la femme vers l’homme pour qu’ils vivent un amour réciproque ? Dieu lui-même. L’amour humain, frères et sœurs bien aimés, est au cœur du projet de Dieu.
L’alliance jusqu’à la croix comme modèle du mariage
Oui car le véritable Seigneur des Anneaux, ce n’est pas Sauron le Seigneur des ténèbres, mais bien Dieu lui-même. Lui veut vivre une vie avec nous en forme de mariage. Quels que soient notre âge et notre condition de vie, le mystère du mariage nous renvoie à un autre mystère : celui de l’alliance. Ce n’est pas par hasard que nous parlons dans la Bible de « première alliance » et de « nouvelle alliance ». C’est peut-être pour nous dire que Dieu veut se révéler à notre âme comme un mari fidèle qui pardonne sans cesse à l’épouse infidèle.
Selon la volonté-même de Dieu, il y a donc un rapport étroit entre la communion de l’homme avec Dieu et la communion des deux conjoints. Pour s’épanouir, pour parvenir à son être véritable, l’homme a besoin d’une aide : l’aide de Dieu, d’abord. Mais aussi, comme le signe de cette aide divine, l’aide d’un conjoint de sexe différent auquel il s’attache tout entier et pour toujours, une aide qui lui soit assortie. Grâce à cette aide exclusive, à l’inverse de la polygamie, l’homme apprend à faire le choix d’une personne unique qui l’aide à unifier toutes ses puissances d’amour, à ne pas les disperser ni les faire tourner en rond telle une toupie. Grâce à cette aide définitive, à l’encontre de la tentation d’innombrables liaisons successives, l’homme fait l’apprentissage de la fidélité de Dieu, et, en retour, l’apprentissage du choix définitif de Dieu.
Toute l’histoire sainte nous parle de cette fidélité-là, de cette exclusivité. Le baptême constitue donc pour un chrétien comme un véritable mariage. Les épousailles de son âme avec Dieu, qui apparaît alors comme l’aide assortie par excellence. Je ne suis plus seul dans ma vie, je sais désormais que Dieu est à mes côtés car, comme le dit si bien saint Paul : « Il est fidèle celui qui vous appelle ». Car sa fidélité, Dieu ne l’a pas simplement édictée par des mots, il l’a scellée sur la croix. L’exigence du mariage chrétien se fonde ici. Dans la croix du Christ. Parce que le Christ nous aimés jusqu’à la croix, parce qu’il a donné toute sa vie sans rien attendre en retour, et parce que le mariage est le sacrement, c’est-à-dire le signe de l’union du Christ et de l’Église. Alors le mariage est un don total et définitif, un don comme Jésus, un don à la suite de Jésus. L’alliance que Dieu a scellée avec son peuple et que nous célébrons dans chaque eucharistie est le fruit d’un don total et complet. L’exigence de Jésus, parfois écrasante dans certaines situations, est à l’image de la croix : douloureuse, lieu de souffrance et d’offrande, en particulier dans les situations difficiles, quand un pardon difficile est requis. Douloureuse mais aussi lumineuse : car la croix du Christ ouvre à la vie, à la vie éternelle, à la vie belle et grande. Notre vie de prière, notre vie intérieure avec Dieu est souvent un long combat de la fidélité. Gardons confiance car en face… il est fidèle, il est notre véritable Seigneur des Anneaux.
La messe, mystère des noces
Un dernier détail mérite d’être souligné ce soir. C’est saint Jean-Paul II qui nous l’offre lorsqu’il dit que « l’homme et la femme dans la communion de leur amour, sont icônes de la communion des personnes divines »… Quand un homme et une femme se donnent pleinement l’un à l’autre dans le mariage, comme un don sans retour, ils sont l’image vivante sur terre de ce qui se joue dans la Trinité Sainte. Quelle merveilleuse audace de Dieu que d’avoir créé l’Homme à son image. Quelle audace divine que de de s’être fait chair. Quelle audace divine que le Christ donne sa vie, et son corps sur la croix par amour. Ce don du corps, chers amis, c’est aussi ce qui se joue à la messe. Dans chaque Eucharistie nous sommes plongés au pied de la croix où le Christ donne son corps à son épouse : l’Église. En communiant au corps offert de Jésus dans l’Eucharistie, nous entrons dans un mystère de noce en recevant de Dieu son amour et sa grâce. « Donne-moi seulement de t’aimer », pourra-t-on chanter tout à l’heure.
En ce dimanche, le maître du mariage ne s’appelle ni Jacques Brel ni Céline Dion, ni Daniel Craig, mais bien Jésus. Il nous rappelle le projet originel de Dieu sur l’homme : projet d’amour et de don total, sans retour, projet de fidélité. Il nous redit qu’il est le premier à vivre cette fidélité et ce don total et que chacun d’entre nous est appelé à vivre sa foi chrétienne comme un mystère d’alliance avec Dieu. Alliance que nous pouvons renouveler dans chaque eucharistie où Jésus offre à son épouse, l’Église, son corps en partage.
Bénissons Dieu pour une telle bonne nouvelle, et offrons-lui nos difficultés à aimer ainsi que tous les mariages blessés. Amen.