Fidèles car bourrés de Talents !

Souvenez-vous de cette scène mythique du film Astérix Mission Cléopâtre quand Numérobis rencontre Amonbofis pour la première fois avec nos amis gaulois : « C’est Amonbofis, il m’en veut à mort, il est bourré de talents » « Ah oui, il est doué, quoi. » « Non il est riche, il est bourré de talents d’or. Le talent est la monnaie égyptienne » et Panoramix de répondre : « En Gaule ce ne sont pas forcément les plus talentueux qui sont les plus riches » 

Découvrir les grâces que Dieu nous fait… chaque jour 

Car quand il est question de talent, on se dit parfois, ou même souvent, qu’on en est dépourvu. Voire, si l’on est un brin provocateur, que Dieu serait même le meilleur promoteur de l’injustice : pourquoi ne donne-t-il pas la même chose à chacun ? C’est vrai ça, c’est dégueulasse. Sur quoi se fonde-t-il pour donner 5 à l’un et seulement 1 à l’autre ? Les Calimero iront pleurer en disant que « c’est beaucoup trop injuste ». C’est peut-être que le plus important de la parole n’est pas là.

La première certitude, le premier repère que j’aimerais que vous puissiez retenir ce dimanche… c’est que Dieu donne et qu’il donne avec joie. À chacun d’entre nous, il a donné des grâces et des talents. 

Nous sommes souvent mal à l’aise vis-à-vis de nos talents car nous les connaissons mal et, surtout, car nous avons en tête une fausse idée de l’humilité. Une sorte de misérabilisme : être humble, ça voudrait dire n’avoir aucun talent, être un gros nul… un peu comme Numérobis qui comme architecte a bien du mal à s’en sortir.

J’aimerais ce soir attirer votre attention sur une réalité spirituelle profonde et capitale : Dieu vous a donné des grâces et des talents à chacun, en abondance, mais pas de manière égale. Il y a des talents cachés et des talents éclatants. Mais Dieu vous a donné des choses. Avez-vous conscience de cela ? Car il est vraiment là, le début de la sainteté !

Et là, s’il vous plaît, pas de fausse modestie ! Si je commençais à dire que j’étais mauvais en informatique, je blesserais le cœur de Dieu en ne reconnaissant pas le talent que j’ai reçu et je me mentirais à moi-même. Chers amis, apprenez à regarder ce qui est beau et grand en vous, ce que Dieu vous a donné. Chacun, individuellement : toi tu es bon en cuisine ou en travaux manuels… mets-les au service du monde ; toi tu es bon en marketing… c’est bien, mets cela au service du monde ; toi tu as de la facilité pour prier… prie pour le salut du monde.

Les dons de Dieu pour notre monde passent par chacun d’entre nous. Dieu donne à chacun de nous certaines qualités… et certains défauts, de manière à ce que nous soyons complémentaires les uns des autres ; de manière à ce que nous ayons besoin les uns des autres ; de manière à créer un tableau harmonieux où chacun trouvera sa place. Non seulement où chacun trouvera sa place, mais où personne ne pourra prendre la place d’un autre. C’est-à-dire que la mission que Dieu vous donne, personne d’autre que vous ne pourra la remplir ; et si vous ne le faites pas, il manquera quelque chose à ce beau tableau que notre Dieu veut composer. Ce tableau, c’est son Église. Si vous n’y prenez pas votre place, vous manquerez ! 

Sortir de la peur de Dieu 

Ayant pris conscience du don gratuit de Dieu, des talents qu’il a semés en nous, il nous faut aussi, dès ce dimanche, sortir d’une relation avec Dieu bâtie sur la peur.

La sainteté véritable ne peut être mue d’abord par la peur de l’enfer. La vie humaine et chrétienne ne peut être bâtie sur une peur de Dieu. Le Christ a livré sa vie par amour pour nous. Il nous a révélé la bonté infinie du Père. 

Face à Dieu, face au Maître de la parabole, il arrive que nous soyons animés par la peur. Comme si Dieu était un gros colérique puéril avec des muscles saillants prêts à nous en mettre une. C’est la peur de la raclée : elle nous fait enterrer notre talent, elle nous fait enterrer notre bonheur pour être certains qu’il ne grandisse pas ; et de fait, il ne grandit pas. La peur nous fait toujours nous recroqueviller sur nous-mêmes. Elle nous interdit la croissance, elle nous interdit le bonheur. N’écoutez pas vos peurs ! Elles sont mortifères. Parfois le risque dans nos vies c’est de fuir ces peurs, de ne pas oser les affronter et de les fuir dans les séries, dans l’alcool, dans l’amitié par internet… pour fuir la peur d’être seul. Chers amis, quand on est chrétien on n’est jamais seul, nous avons Dieu avec nous, nous avons Dieu qui nous a comblés de ses dons.

Chaque jour le Christ vous donne sa grâce, la grâce du moment, la grâce du temps présent. 

Et c’est cela, le talent véritable. Frères et sœurs bien aimés, avez-vous conscience d’être aimés de Dieu ? Avez-vous conscience que, quand Dieu vous regarde, il s’émerveille… ? Il se dit : « Wahoo… j’ai bien fait de la créer, elle ; non, vraiment, je ne me suis pas planté ».

Avez-vous de la gratitude pour ce que Dieu a déposé dans vos cœurs, dans vos corps, comme talent, comme don de son amour. 

Frères et sœurs bien aimés, osons poser un regard de bonté sur nous-mêmes : le regard que Dieu pose sur nous ! Un regard de confiance : Dieu vous fait confiance pour développer les dons qu’il a mis en vous.

Dans l’amitié ou la famille, s’émerveiller des talents des autres : l’école de la fidélité 

Enfin chers amis, notre lecture de la parabole ne saurait faire l’économie du regard des autres et du regard sur les autres. Mon premier Père spirituel ne cessait de me dire : « Comparaison = poison ». Dans notre lecture moderniste de la parabole des talents, nous nous heurtons si souvent à cette soi-disant discrimination. Le Maître ne te demande pas d’avoir les mêmes muscles que tes voisins, d’être aussi doué en Marketing digital ou au piano. D’être aussi à l’aise à l’oraison ou consciencieux dans la peinture. Non. Le Seigneur te demande de faire croire ce qu’il t’a donné. Et pour cela, il y a un lieu privilégié : c’est la famille et la vie amicale. 

Comme j’aimerais que nous ayons plus de bienveillance les uns pour les autres ! Que nous sachions nous émerveiller du talent des autres et le dire. Dire ce qui est beau, ce qui est grand en eux : s’il vous plaît, je vous en supplie, dites aux gens, dites-leur ce qu’ils font de bien plutôt que de ne leur envoyer que des pavés dans la gueule ! Les autres peuvent nous faire prendre conscience des grâces de Dieu et de notre responsabilité. N’ayez pas peur, par pitié, de dire ce que vous admirez chez les autres. Cela soignera votre jalousie et cela aidera l’autre à grandir. Nous sommes appelés à être des révélateurs de grâce chez les autres. À tous nous souvenir, les uns et les autres… que nous avons tout reçu de Dieu. 

Enfin, un petit quelque chose de concret pour faire grandir nos talents et ne pas nous retrouver sans fruit, ne pas les enterrer bêtement. C’est d’apprendre à être fidèle. Fidèles aux dons que Dieu nous a faits. Fidèles à de petites choses comme le disait la prière d’ouverture : « Accorde-nous, Seigneur, de trouver notre joie dans notre fidélité ». Car c’est le début de la croissance. La personne qui commence au début du confinement un programme de course à pied autour du Luxembourg aura besoin de persévérer dans la fidélité pour faire grandir le don de Dieu. Ce sera difficile au début. Et pourtant avec fidélité, il parviendra à développer ses muscles, à maigrir, et peut-être, qui sait, à participer au prochain marathon de Paris. Cette petite fidélité à la course tous les deux jours lui permettra de réaliser de grandes choses. De la même manière, avant de vouloir changer le monde… commence par changer un petit quelque chose de ta vie… commence par choisir, cette semaine, une chose que tu veux faire grandir, et sois fidèle !

Découvrir nos talents, faire confiance à Dieu, entrer dans la fidélité pour les faire porter du fruit. Voilà les clefs de l’Évangile du jour. Ne soyons pas comme Amonbofis, mais laissons le Seigneur de gloire nous aider, en cette Eucharistie, à prendre conscience de ce que nous sommes à ses yeux. Oui « tu as du prix à mes yeux, et je t’aime », nous dit-il dans chaque Eucharistie.  Amen !