Folie ou Foi ?

En cette période estivale, on voit chaque jour décoler de petits avions au dessus de la Tranche Sur Mer. Dans certains de ces petits avions il y a des hommes et des femmes venus faire un baptême de parachutisme. Et lorsqu’ils sont dans l’avion, voir sur la petite rambarde de l’avion, ils peuvent se demander comme St Pierre : Que Diable allait-il faire dans cette galère ? Que Diable Pierre s’est-il jeté à l’eau, plutôt que de rester prudemment dans la barque ? 

Reprenons un peu le contexte. Jésus vient de multiplier les pains et nourrir une foule … c’était l’épisode de la semaine dernière… Les foules ont été impressioné mais l’Evangile nous dit que c’était plus parce qu’elle ont eu le ventre rempli plus que le cœur comblé. Les apôtres sont donc dans la barques. Les apôtres c’est un peu la dreamteam du Christ. L’équipe de choc, les Mbappé et Neymar de l’époque. Eux aussi on été impressionner par le miracle des pains. Peut être même dans leur cœur se sont ils dit que ce serait la fin de leur problème matériel… pensez donc vivre avec un gars qui transforme l’eau en vin et multiplie les pains. 

Sauf que l’enjeux de l’Evangile ce n’est pas d’impressionner… mais de susciter la foi. 

Regardez un instant la première lecture. Elie, le grand prophète a eu quelque soucis avec le roi Acab… et il a demandé à Dieu de mourir… mais Dieu ne l’a pas entendu. Il n’est pas en forme le pauvre Elie. Franchement déprimé à ce demander le sens de sa vie de prophète. Alors Dieu décide de rendre une petite visite à Elie alors qu’il est seul sur la montagne. Une visite de Dieu, si l’on écoute Hollywood, ca doit être grandilocant avec force éclair et autres vent. Et le rédacteur du livre des Rois nous le fait sentir… mais Dieu n’était pas dans les bourrasques, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu. Dieu était dans le murmure d’une brise légère. Autrement dit dans le discrétion. Il a fallut a Elie la force de la foi pour reconnaitre cette visite de Dieu. Dans notre vie c’est pareil. La Visite de Dieu est parfois discrète. C’est la parole d’un ami, une phrase de la Bible, un instant devant le st Sacrement. Extérieurement rien ne se voit et pourtant Dieu passe, Dieu visite. Voilà un premier aspect de la foi. 

La foi c’est donc d’abord quelque chose de discret… et pourtant. Il faut aussi regarder Pierre aujourd’hui. On s’arrête trop souvent sur la phrase « homme de peu de foi » en disant que Pierre franchement s’est bien fait enguellé par Jésus… mais on oublie que dans l’expression « homme de peu de foi »… il y a quand même de la foi. Et Pierre a assez de foi c’st à dire de confiance en Jésus pour s’avancer sur la mer. Premier enseignement que nous devons tirer de ces paroles et de ces actes de Jésus : croire ne consiste pas à rester assis sur la plage à réciter de temps à autre, sans bouger ni se mouiller, quelques idées sur Dieu, mais à se jetter à l’eau, à s’avancer en eau profonde pour rejoindre Jésus. La foi n’est pas un simple sentiment, une opinion purement intérieure qui devrait rester immobile ; elle est un engagement réel et concret du cœur et de toute la personne à suivre les traces aquatiques, apparemment très instables, de Jésus. Qui ne fait pas cette expérience avec Pierre, qui préfère rester dans la barque avec les autres disciples apeurés, se condamne à l’immobilité, à la stérilité, à l’atrophie de la foi. Ce n’est pas pour rien que Pierre, le premiers des apôtres, s’est jeté à l’eau : c’est pour nous montrer, à nous tous, disciples de Jésus, ce qu’est le chemin de la foi, — si du moins nous voulons que notre vie se déploie, se dilate de la vie même que Jésus vient nous donner.

Un autre point mérite d’être souligné … et il rejoint le parachutisme dont je parlais au début de l’homélie. Qu’est-ce qui a fait paniquer Pierre ? Puisque selon l’Evangile il s’est avancé vers Jésus. C’est qu’à un moment il n’a plus compté que sur ses propres forces. En sautant en parachute si vous ne faite pas confiance au moniteur c’est foutu. Et bien pour Pierre c’est la même choose : Pierre a voulu compté sur ses propres forces. Pierre a voulu regarder ses pieds plutôt que de regarder le visage du Seigneur. La foi c’est donc une relation de confiance. Une relation amoureuse avec le Seigneur. L’amoureux ne dit jamais à son amoureuse quand il lui dit « je t’aime » : prouve le moi. Mais dans les yeux de sa dulcité, il sait, il fait confiance, il choisit d’aimer. Croire c’est donc d’abord faire confiance au Seigneur… même quand cela paraît impossible. 

Mais revenons à notre question initiale : pourquoi donc a-t-il fallu que Pierre se jette à l’eau, qu’il coule et crie vers le Seigneur, pour qu’enfin Jésus monte dans la barque et la conduise à bon port ? N’aurait-il pas été plus simple et plus conforme à la toute puissance divine que Jésus fasse directement tomber le vent (Mt 14, 32) et donne aux disciples la force de ramer tranquillement… que la vie soit finalement un long fleuve tranquille ? C’est que Jésus, une fois encore, a voulu nous enseigner que le moteur principal de la vie chrétienne, c’est l’accueil de la miséricorde de Dieu. La foi de Pierre n’est devenue forte qu’à travers l’expérience de sa propre faiblesse, lorsque, commençant à couler, il s’écria : « Seigneur, sauve-moi ! » (Mt 14, 30). Croire au Seigneur, c’est avant tout et plus que tout, croire que Jésus vient nous sauver du désastre dans lequel nous sommes, du désastre que nous sommes devenus, du désastre de la mort et du péché qui nous accable sans cesse. Pas de foi qui progresse et s’affermisse en dehors de l’appel répété vers la miséricorde du Seigneur et de l’accueil de son pardon. Car lorsque je suis faible, c’est alors que je suis fort, car, dit le Seigneur, c’est dans la faiblesse que ma force se déploie (2 Co 12, 9-10).Alors, frères et sœurs, s’il est une leçon que nous devons retenir de cet évangile aujourd’hui, c’est un appel pressant à devenir, à la suite de Pierre, d’authentiques navigateurs de la foi. Non pas des capitaines de pédalos qui végètent sur un étang croupissant, non pas de présomptueux aventuriers qui prétendent affronter en solitaire les quarantièmes rugissants, mais des matelots de la barque de Jésus qui apprennent jour après jour à se jeter à l’eau vers Jésus, dans la foi, pour mieux se laisser remonter dans la barque sous la ferme main de la miséricorde de Jésus. Et c’est ainsi, par l’engagement de tous et de chacun, que l’Église du Christ ne cessera de se renouveler, de s’embellir, de croître, et d’avancer sûrement vers le port de la vie éternelle.