Humbles et pauvres nous te supplions !

A la veille de la rentrée scolaire et de la reprise de l’école, voilà bien une phrase qui pourrait faire trembler les parents : quiconque s’élève sera abaissé ; qui s’abaisse sera élevé. Faudrait il-donc que les enfants cherchent absolument à se battre pour être dernier à l’école, de telle sorte que Jésus les élève ? Pourtant la dernière place, personne n’en veut : que ce soit à l’école, à la course à pieds, au championnat de France de foot, ou dans la liste des augmentations de salaire… Je ne suis pas sûr, chers amis, que ce soit la bonne stratégie, et que le conseil de classe utilise le même sens de la justice que le Seigneur. Il n’empêche, les lectures de ce dimanche de « rentrée » nous offrent un beau programme de vie chrétienne et familiale pour l’année. Celui-ci comporte deux volets : l’humilité d’une part, la gratuité d’autre part. Cela me fait penser à une petite prière que le prêtre dit à voix basse pendant la messe en s’inclinant devant l’autel et qui dit « Humble et pauvre nous te supplions Seigneur, que notre sacrifice en ce jour trouve grâce devant toi ». 

La qualité du Christ 

Mais attention, avant de parler de nous, de notre petite vie de chrétien, les lectures de ce dimanche nous parlent du Christ. Qui s’élève sera abaissé ! Personne ne s’est abaissé plus que lui. Lui qui était Dieu, il ne s’est pas accroché à ce privilège unique mais, avec la chair, avec un corps comme le nôtre, il a pris un rang d’esclave, acceptant de fréquenter les hommes, il a été fatigué, il a dû dormir et manger, a dû subir la jalousie des hommes, leur ressentiment, leur haine, jusqu’à la torture et la mort sur la Croix. Quel abaissement!

Oui, personne n’a jamais choisi la dernière place autant que Jésus. On imagine difficilement la reine d’Angleterre échanger sa position avec un SDF du métro parisien…  et bien le Christ l’a fait de manière encore plus impressionnante : « il s’est abaissé, devenant obéissance jusque la mort… et la mort de la croix » . La gratuité aussi. Jésus donne sa vie gratuitement : « ma vie, nul ne la prend mais c’est moi qui la donne ».

Le chrétien, c’est celui qui cherche à imiter le Christ. C’est donc un beau programme de rentrée scolaire et de rentrée paroissiale que le Seigneur nous offre en ce dimanche : non pas des attitudes morales extérieures, mais une belle manière de suivre Jésus au plus près pendant cette année.

L’humilité d’abord

Au début de cette année, c’est l’heure des bonnes résolutions. Y compris des bonnes résolutions spirituelles. Au début d’une année, nous pensons souvent qu’être un bon chrétien, c’est être quelqu’un de parfait, on prend du coup des tas de résolutions, parfois un peu déconnectées de la réalité pour avancer sur le chemin de la «perfection chrétienne », comme si à Noël, Monsieur le curé allait nous distribuer les bulletins de notes spirituelles, avec des appréciations… La seule et unique bonne résolution de cette rentrée, c’est d’entrer un peu plus dans l’humilité du Christ : « vas te mettre à la dernière place » qu’est-ce que cela veut dire ?

Je crois que le chemin de l’humilité chrétienne, c’est d’accepter ta faiblesse. Comme le dit si bien le P. Adrien Candiard dans un livre magnifique que j’ai lu cet été : « nous avons sans doute en nous un grand saint qui attend de se révéler ; mais nous avons aussi en nous un pécheur, peut être pas très grand et lui aussi, il convient de le sauver. » Pour cela, pour accepter le salut pour lui, il faut accepter le pécheur qui est en nous. L’accepter sans complaisance avec son péché, sans découragement mais sans en ajouter non plus »… l’humilité, c’est accepter en vérité, ce que je suis. Combien je vois des hommes et des femmes, des jeunes et des moins jeunes qui, face à leur péché ou à leur défaut, baissent les bras. Debout !

En cette rentrée : soyons fort ! Oui, vous n’êtes pas parfaits, oui je ne suis pas parfait. Nous sommes tous des pécheurs et il faut arrêter de rêver d’une église de purs et de parfaits : depuis la nuit des temps, l’Eglise est une église tâchée par le péché de ses membres.

Quelle belle résolution nous prendrions en ce début septembre, que d’apprendre à nous regarder en vérité. A nous regarder pécheur et faible ! Mais attention, non pas avec un regard d’accusation, non pas sous le feu de la culpabilité, mais sous la lumière du salut. 

Etre humble, être disciple du Christ, c’est savoir en profondeur que j’ai besoin de lui. C’est avoir conscience que « sans lui nous ne pouvons rien faire ». Que mon année scolaire, mon année paroissiale, je dois la vivre en mettant mes péchés et mes blessures sous le soleil de la miséricorde. L’humilité, c’est cela. Prendre la dernière place, ce n’est pas chercher le misérabilisme, tout faire pour être le dernier au contrôle de Maths et être le dernier à recevoir une augmentation … être humble c’est accepter qui je suis, c’est accepter que j’ai besoin du salut en Jésus. Que j’ai besoin de mendier la consolation auprès de Dieu. 

La joie de la gratuité ensuite 

Jésus est aussi un invité un peu étrange : alors qu’il est invité à un joli dîner très sympathique, il est à l’apéro en train de prendre le saucisson et la bière (certainement une bière de l’abbé) et il explique qu’il faut inviter les aveugles, les estropiés et ignorer ses amis. On peut le trouver un peu gonflé, le Christ, dans cette affaire. Comme si tu invitais à ton goûter d’anniversaire que des enfants que tu ne connais pas et que tu n’invitais aucun de tes copains d’école. 

Que veut-il donc nous dire là ? Il veut d’abord nous parler de lui. Jésus le premier donne gratuitement. Quand je communie au Corps du Christ c’est lui qui se donne à moi. 

En ce début d’année, n’attendons pas d’être des parfaits, d’être des gens impeccables pour donner au service des autres, pour nous engager joyeusement dans le don gratuit de nous-même. Joie de l’homme Jésus, c’est donc la même que du Père; elle consiste à donner gratuitement, et à rendre heureux ceux qui bénéficient de ce don. Le drame, c’est que le monde l’ignore encore, souvent parce que les chrétiens eux-mêmes en doutent, ou ne croient pas en être capables. 

Si tu commences par donner un peu de ton temps, ton égoisme diminuera : Yes we can !

Si tu acceptes de donner quelque chose qui t’appartient : un livre, un goûter, un diner sans attendre en retour quoi que ce soit, ton cœur s’ouvrira : Yes we can !

Si tu apprends à t’accepter tel que tu es, en vérité devant Dieu, humble et pauvre, ton orgueil diminuera : Yes we can !

Si tu acceptes de confier ta faiblesse à Dieu pendant cette année, dans la confession et la prière, en lui demandant de te sauver alors il ne restera pas sourd à ton appel : Yes we can ! 

Si tu ouvres ton âme un peu au Christ humble qui donne sa vie sur la croix, alors oui il t’aidera à suivre le même chemin dans la joie : Yes we can ! 

Si nous supplions l’Esprit-St de nous rendre semblable à Jésus, Il le fera. Yes, we can

Si nous sommes serviteurs du Christ, notre soif de domination s’épuisera. Yes, we can

Si nous aimons sans attendre de retour, pour être comme Jésus, il sourira. Yes, we can

Oui heureux sommes-nous si nous le faisons. Amen !