Trois gestes et trois signes de Sa présence

L’autre jour, chez des amis je redécouvrai une vidéo humoristique qui parodiait une chanson connue de Maitre Gims. La parodie s’intitulait : «baptisé comme jamais ».

Au moment de parler de la messe, la chanson dit : « On dit la messe avec trop de style, on rajoute du swag dans ton hostie » …

Si la chanson est amusante, est-ce vraiment cela la messe ? Ajouter un petit quelque chose dans un morceau de pain sans levain rond ? Pour mieux comprendre et mieux aimer le mystère que nous célébrons aujourd’hui, j’aimerais reprendre avec vous trois gestes et trois signes de la présence de Jésus. 

Il est là sur la croix : élever les yeux

D’abord une chose étrange. Vous avez sans doute remarqué qu’à la messe, le prêtre consacre séparément le corps et le sang du Seigneur comme si ces deux réalités étaient complètement différentes. Mes cours de biologie ont beau être un peu loin, et je ne suis pas un expert en criminologie, je sais au moins une chose : lorsqu’il y a le corps d’un coté et le sang de l’autre il y a un problème… pas besoin de s’appeler inspecteur colombo pour le savoir !

En réalité, le mystère de l’Eucharistie est inséparablement lié au mystère de la croix. Célébrer en ce matin le Corps et le Sang du Seigneur, c’est confesser qu’il a donné sa vie pour nous, sur la croix, et que c’est à cela que nous voulons communier. A chaque messe, au moment précis de la consécration, 2000 ans d’histoire sont balayés et je suis présent au pied de la croix. On appelle cela le mystère de la contemporanéité : je suis rendu contemporain à l’unique sacrifice du Christ sur la Croix. Ainsi donc, pendant la consécration, je n’ai plus Germaine ou Paul à ma gauche et à ma droite, mais bien Saint Jean et Sainte Marie. Oui, la messe, c’est le signe de l’amour qui se donne, de l’amour qui se donne jusqu’au bout sans retour. De l’amour de la Croix.

Oui, la messe n’est pas un joli souvenir sympathique, la messe est le sacrifice de l’amour du Fils qui donne sa vie, tout entier, corps et sang pour nous sauver ! Ce moment je ne peux pas le rater. Jamais. Edmond Michelet, alors ministre de la république se trouvait un jour un dimanche en déplacement officiel et demande au préfet : «Monsieur le préfet, à quelle heure est la messe aujourd’hui ? » « Mais monsieur le ministre, vous n’y pensez pas, nous sommes dans une république laïque » et le ministre de rétorquer : « J’ai risqué ma vie chaque jour dans un camp de concentration pour assister à la messe. Ce n’est pas un préfet de la République qui va m’en empêcher ! ». Bel exemple de foi.

Quand le prêtre élève l’hostie : je contemple donc Jésus qui se donne sur la Croix. 

 Parfois, à ce moment, les gens baissent la tête. Ben non, ce n’est pas le moment de baisser la tête ! Au contraire, c’est le moment de regarder Jésus, de le regarder les yeux dans les yeux j’allais dire, de regarder vers lui et de lui dire « mon Seigneur et mon Dieu » comme saint Thomas, « reste avec moi » comme les disciples d’Emmaüs. Tant que vous regarderez vers lui, vous serez sauvé. Tant que vous regardez vers lui, vous serez dans la bonne direction, vous avancerez vers lui. Vous avez déjà essayé d’avancer dans une direction en regardant ailleurs ? C’est compliqué ! Regardez vers Jésus et, seulement après, en même temps que moi, vous vous inclinez en signe de profonde adoration.

La communion à l’amour du fils : se mettre en marche 

Parfois nous venons un peu distraitement à la messe. Parfois même, nous communions en pensant à autre chose, ce qui aurait de quoi faire bondir ceux qui n’ont pas encore accès à la communion, et qui le désirent de tout leur cœur. 

Pour nous aider à entrer dans ce mystère, j’aimerais vous raconter une petite histoire.

Elle se passe au Cambodge. A l’époque Mgr Ramousse est évêque là-bas et célèbre clandestinement dans la forêt.

Un jour, il voit arriver une femme et sa fille qui avaient fait 700 kms pour participer à la messe. A la fin de la célébration, la mère explique à l’évêque que son mari a été assassiné et qu’elle voudrait que sa fille devienne religieuse. L’évêque refuse. Mais tout de même … 700 kms pour une messe !

Mais qu’elle n’est pas sa surprise quelques semaines plus tard de voir débarquer la jeune fille de 12 ans seule : «les soldats ont su que nous avions participé à la messe, dit-elle, alors ils ont arrêté maman et l’ont mise en prison. Alors je suis venue chercher la communion, pour la porter à maman en prison ! Quelle foi ! Quel amour de Dieu ! Quelle confiance en la puissance de Dieu ! Oui, frères et sœurs nous devrions désirer la communion comme un premier communiant, comme un catéchumène, qui s’y est préparé depuis des années, comme cette petite jeune fille !  

Pour aller communier tout à l’heure, il nous faudra marcher. Non pas 700 kms mais quelques mètres. Vous vous avancez. Pourquoi ? C’est vrai, je pourrais moi venir à vous, ou encore je pourrais vous faire passer le ciboire avec les hosties, ce serait quand même plus simple. Mais non, vous vous avancez et ce mouvement est très important …

Personne ne vous oblige à vous mettre en chemin, vous pourriez même rester toute votre vie assis sur un banc à attendre. J’en connais des personnes qui attendent toute leur vie, mais là le Seigneur vous dit : «  N’attends pas, lève-toi et avance, viens vers moi ». Dieu ne s’impose pas à nous, il ne nous contraint pas, il s’approche de nous, mais il veut aussi que nous fassions cet acte volontaire, il veut que nous nous approchions de lui.

Adorer à genoux ! 

Enfin le troisième geste, le troisième signe de la présence de Dieu en cette Eucharistie c’est l’adoration. L’adoration Eucharistique c’est le prolongement naturel de la messe. Un peu comme l’époux et l’épouse aiment à se regarder l’un l’autre. En regardant le Christ présent sous l’apparence du Pain et du Vin, je peux l’adorer, je peux lui parler. 

Que ce soit pour l’adoration ou la consécration, l’église nous invite à nous mettre à genoux. C’est un drôle de geste, se mettre à genoux, c’est un geste qu’on fait si rarement. En fait, on ne le fait même presque jamais. Nous, catholiques, nous ne le faisons que devant Dieu, comme les mages quand ils sont arrivés à la crèche, en arrivant devant l’enfant Jésus : ils se sont agenouillés. Pourquoi ? parce que c’est le geste de l’adoration.

Si un enfant dit à sa maman « maman j’adore le nutella » sa maman aura raison de lui répondre qu’on n’adore pas le nutella, qu’on adore que Dieu. C’est vrai, après tout, avez-vous déjà eu envie de vous mettre à genoux devant un pot de nutella ? 

Alors oui, quand je me mets à genoux, je confesse par mon corps que Jésus est présent. Que j’ai foi en lui, que je crois profondément qu’il a donné sa vie pour moi et que je veux l’adorer de toute mon âme. Je crois que même si Jésus est caché sous les apparences du pain et du vin c’est bien lui mon Seigneur et mon Dieu !

En ce jour de sainte joie, nous pouvons reprendre conscience que le messe ne consiste pas seulement à mettre du « swag dans ton hostie » mais qu’il nous faut en ce jour élever les yeux vers le Seigneur en Croix, nous mettre en marche à sa suite, pour nous unir à lui, avec tout le désir de notre coeur, et l’adorer sans partage.