T’y crois toi ?
« T’y crois, toi, à la victoire ce soir ? » « Tu crois que Mbappé va rester à Paris pour une saison de plus ? » « Tu crois qu’il fera beau au Puy du Fou le weekend prochain ? – Oui ! La météo l’a dit hier, sur TF1 » « Tu crois qu’on pourra organiser le pélé cet été malgré ton nouveau boulot ? » « Non ! je ne te crois pas ? La Reine d’Angleterre a un rhume… » « Moi je crois que mon fils va réussir son bac avec mention…. » tandis que les plus jeunes se disent : « Tu crois que tu vas passer en Première ? » et Bob de répondre « Oui bien sûr que j’y crois, j’ai consulté une voyante sur Internet, elle m’a dit que ça devrait passer crème pour une fois ».
Combien de fois par semaine nous utilisons le mot « croire » ? Bien souvent nous vérifions telle ou telle assertion sur Internet, parce qu’Internet c’est quand même plus fiable que l’info du copain. Mais quand on parle de foi, on peut aussi penser un peu au cinéma (oui je sais, ça fait longtemps que je ne vous en ai pas parlé !) : dans Indiana Jones, la dernière croisade il y a une scène tout a fait intéressante, on y voit Indy face à un grand vide, incapable de passer de l’autre côté alors qu’il semble respecter le plan. Acculé par l’ennemi, obligé à passer de l’autre côté du gouffre pour sauver la vie de son père et récupérer le Saint Graal, et encouragé par ses amis qui lui crient « c’est le saut de la foi, Indy ! », il s’élance dans ce qui semble être du vide, mais au lieu de s’écraser comme une crêpe cent mètres plus bas, il découvre alors une passerelle bien camouflée par un jeu de perspectives, qui lui permet de traverser. Il a fait le saut de la foi !
Le doute de Thomas
Parce qu’en parlant de foi, en ce dimanche nous pouvons contempler un homme qui n’a pas bonne presse. Je veux bien sûr parler de saint Thomas. Le pauvre homme est devenu bien malgré lui le patron des incrédules, ou le saint qui justifie toutes nos incrédulités…
C’est quoi le problème de saint Thomas ? C’est qu’il était absent. Et comme tous les absents quand on leur raconte quelque chose de trop beau, ils se disent « Non, ce n’est pas vrai ! », et on leur rétorque « Ben quoi, tu ne me fais pas confiance ? Tu ne crois pas ce que je te dis ? » Et alors le doute s’installe, le doute se creuse entre eux et nous.
Thomas, lui, était absent au cénacle. Il n’était pas là tandis que les disciples faisaient cette expérience magnifique de la rencontre de Jésus, non pas une rencontre extraordinaire, juste une rencontre qui les a fait passer de la crainte à la joie paisible — « la paix soit avec vous. » avons-nous entendu dans l’Évangile.
Mais en fait il n’y a pas que Thomas qui doute, nous aussi nous doutons. Plus souvent qu’on ne veut l’avouer. Et pourtant, et pourtant, nous avons fait l’expérience déjà de cette douce présence de Jésus dans nos vies. Vous savez, la joie du cœur, la paix de l’âme, une force qui nous gagne quand vous êtes dans la détresse, la lumière qui soudain se fait sur une décision à prendre, un cœur charitable qui veut se donner, un cœur de pierre qui s’assouplit et s’ouvre. Lors d’une retraite, le jour de ma confirmation, lors d’une confession… à chacun de nous est donnée une expérience différente de la présence de Jésus, parce que c’est une expérience personnelle. Et puis nous l’oublions. Nous oublions cette expérience, alors que sur le moment nous étions absolument certains de cette présence. Et l’on se laisse gagner par les soucis, les tracas, le doute… qui reprennent le dessus. Nous sommes comme absents à notre propre histoire, comme amnésique de la grâce de Dieu déjà reçue !
La nature de la foi
Et pourtant, dans ta vie tu ne cesses de poser des actes de confiance et de foi. Car sans confiance pas de vie sociale possible. Sans confiance, la vie devient un enfer. Ne serait-ce que quand tu prends le métro, tu ne vérifies pas si le train va effectivement s’arrêter à ta station, tu fais confiance au conducteur qui ne va pas lancer le train à 100 km dans un pilier du pont, tu poses un acte de foi. Dans la relation à Dieu, la foi passe d‘abord par la confiance.
La foi, c’est faire confiance à celui qui m’a créé, qui m’a racheté par sa croix et qui m’a donné une vie nouvelle, qui m’ouvre les portes du ciel. Pourquoi faire confiance ? Parce que c’est Dieu qui nous le dit. Parce que même si je me trompe sur le victoire du Real, eh bien Lui, Dieu, ne peut pas se tromper. Parce qu’il est bon par nature et qu’il veut mon bien. Parce qu’il m’a créé par amour.
Parce qu’aussi la foi c’est un don de Dieu. Au jour de notre baptême nous avons reçu dans notre cœur la foi. Et Dieu peut toujours faire grandir en nous la foi si on le lui demande. « Seigneur, augmente en moi la foi » Parce que la foi est une joie : « Heureux celui qui croit sans avoir vu »
Croire c’est ce qu’a fait Thomas : quand il reconnaît son Sauveur et son Dieu, il ne dit pas « Attends, maintenant tu peux me le prouver scientifiquement » ! Il confesse, il adore, il aime : « Mon Seigneur et mon Dieu ». À force d’insister sur son doute, on oublie que Thomas est d’abord un témoin de la foi. Il croit, il va mettre toute sa vie au service de cette foi : croire que Jésus est vivant, et l’annoncer par-delà les frontières. L’annoncer jusqu’à donner sa vie aux Indes comme martyr de la foi. Oui, saint Thomas est d’abord un héros de la foi !
Entretenir sa foi !
Mais la foi, chers amis, d’une part elle s’entretient, et d’autre part, elle s’appuie sur la miséricorde de Dieu. Dieu sait que nous avons besoin d’éléments tangibles pour croire. N’est-ce pas Jésus qui leur a dit : « Voyez mes mains et mes pieds ; c’est bien moi ; touchez-moi ». Et nous avons déjà fait l’expérience dans notre vie de cette douce présence de Dieu dans nos vies.
Pour entretenir la foi, il faut entretenir la mémoire de ces moments-là. Non pas la nostalgie : « Ah, comme c’était bien quand j’avais le cœur tout chaud à telle adoration ! » Mais la mémoire : « Jésus m’a donné de sentir sa présence ce jour-là pour que j’aie la force de vivre aujourd’hui ». Concrètement, prends un cahier, marque tes grâces et prie le Seigneur en lui demandant de te préserver de l’oubli et du doute !
Pour entretenir la foi, il faut aussi poser des actes de foi. On raconte que sainte Thérèse de Lisieux a posé plus d’actes de foi dans sa dernière année que dans tout le reste de sa vie. Poser un acte de foi c’est choisir de croire à sa foi et de douter de ses doutes. Car ce sur quoi on se concentre grandit. Si je me concentre sur mon nombril et sur mes doutes alors oui, il vont grandir. Si je me décentre de mon nombril, et que je regarde d’abord le cœur de Dieu, que je regarde d’abord celui qui m’a aimé et s’est livré pour moi, alors oui je choisis de lui faire confiance pour aujourd’hui. Je choisis, de toute ma volonté, qu’il soit la lumière de ma vie.
Pour entretenir sa foi, il ne faut pas poser de condition à Dieu du style « Seigneur je croirai en toi quand ma grand-mère sera guérie », « Seigneur je croirai en toi quand j’aurai eu 18 à mon exam que je n’ai pas révisé » ou « Seigneur je te ferai confiance quand j’aurai enfin trouvé l’amour sur la tour, l’amour de mes jours. ». La foi c’est la confiance gratuite et amoureuse en Dieu qui se révèle à toi !
Alors pourquoi choisir la foi en ce dimanche ? Parce que le doute attriste, parce que nous ne sommes pas fait pour vivre dans le doute, parce que la défiance et la méfiance sont mortelles, mortelles dans nos relations humaines et mortelles dans nos relations divines.
Alors que la foi et la confiance font des merveilles, la foi change tout dans une vie. Regardez les disciples qui ont mis leur foi dans le Seigneur, regardez les Saints, leur vie a été transformée pour une seule raison : parce qu’ils ont cru, ils ont cru de tout leur cœur que Jésus est ressuscité, non pas du bout des lèvres, non pas du bout du cœur, non, ils ont cru d’un cœur généreux, d’un cœur confiant et, la foi change tout dans une vie.
La foi chasse le doute.
La foi chasse la peur.
La foi fortifie.
La foi rend patient dans l’épreuve.
La foi apaise l’âme inquiète.
La foi éclaire le chemin.
La foi donne un sens à la vie.
La foi nous ouvre à l’inconnu.
La foi élargit les cœurs.
La foi fait grandir la joie.
La foi fait des merveilles.
Heureux sois-tu, Thomas, d’avoir vu et d’avoir cru
« Heureux ceux qui croient sans avoir vu »,
Heureux sommes-nous.