Fiat ! Magnificat ! (4ème dim. de l’Avent)
Il était une fois un brave curé de campagne qui se laissa conter par son sacristain le menu du réveillon du soir : « Dinde au marron et truffe, Liboke ya mbisi, foie gras poêlé accompagné de son sancerre d’une bonne année, plateau de brie de Meaux et autres fromages de nos régions puis bûche de Noël impériale »… et qui se laissant conquérir par l’imagination s’en vient à s’évader pendant la messe à la table du soir. Chaque fois que tinte la clochette pendant la messe, le brave prêtre imagine les plats qui défilent devant lui. Et lorsque vient le moment de dire « le Seigneur soit avec vous » il pense dans son cœur au bénédicité de ce repas de fête. Non décidément il est bien distrait. Les trois messes de Noël s’enchaînent à une vitesse folle car il se dit au fond de son cœur « plus vite j’aurai fini, plus vite je serai à table » … pris d’un grand désir de gourmandise, il se rue sur le missel et dévore la messe avec une rapidité sans nom. A mesure que le réveillon approche le brave curé est pris d’une folie d’impatience : il remue à peine ses lèvres … enfin, assis à la table de fête le brave prêtre s’attaque à la volaille et au fromage avec tant de vigueur qu’il en mourut dans la nuit sans avoir le temps de se repentir….
Heureusement nous disons nous, en ce jour, alors que la lumière de Noël fait son apparition nous sommes bien ici pour célébrer le 4ème dimanche de l’Avent, pour prendre le temps de goûter au dernier quartier du festin de l’Avent sans s’attaquer à celui de Noël en avance. Pas facile lorsque le 24 décembre est un dimanche de l’Avent.
Alors qu’a-t-on au menu de la parole de Dieu dans ce jour qui nous permette d’éviter de laisser courir nos imaginations vers les délices des tables de fêtes de ce soir… J’y vois deux ingrédients : la demeure de Dieu et la liberté d’une femme.
La demeure de Dieu
Le grand roi David est devant un dilemme. En tant que Roi et bâtisseur de Jérusalem, il vit dans un palais somptueux. Il s’est bâti une maison de cèdre pour habiter mais également pour gouverner, c’est à dire pour se mettre au service de son peuple et il s’inquiète du sort de Dieu. Son attitude est, on ne peut plus, louable. Où Dieu peut-il habiter sur cette terre ? Cependant, le risque pour David c’est de vouloir comme enfermer Dieu, pouvoir lui dire : « tu as vu, j’ai fait une belle maison… j’espère que tu es bien là… » et Dieu, par l’entremise de Nathan se charge de le remettre à sa place : c’est moi qui suis le gardien d’Israël, c’est moi qui t’ai fait sortir d’Egypte… ne te trompe pas, c’est moi qui prends soin de toi. Et Dieu affirme en même temps que la question de David n’est pas idiote, où Dieu peut-il demeurer sur la terre, comment les hommes peuvent-il le rencontrer ? Serait-ce indéfiniment dans la tente de la rencontre tel que c’est depuis Moïse.
Si le temple de Jérusalem sera construit par Solomon, fils de David, c’est bien Dieu lui-même qui va se susciter une demeure digne de son nom et un roi plus grand dont le trône ne sera jamais ébranlé. Cette demeure a un nom, c’est la Vierge Marie. Ce roi a un nom c’est celui de l’enfant dont on fêtera ce soir la naissance : Jésus-Christ.
Le sort du monde suspendu à la liberté d’une femme
Vous l’avez compris, c’est dans la scène Evangélique que nous venons d’entendre que s’accomplit le désir le plus profond de Dieu : demeurer sur la terre. « Il sera grand, il sera appelé Fils du Très Haut et il régnera sur le trône de David ». La Royauté établie par David va trouver en Jésus un descendant digne de ce nom. Plus encore, par Marie un temple nouveau va s’établir : le sein de la Vierge Marie.
Cependant, pour arriver à ses fins, Dieu s’abaisse à demander à un petite jeune fille de Galilée. Etonnant Dieu qui au grand roi interdit de bâtir une maison mais demande à la jeune vierge la permission de prendre chair en son sein. C’est tout de même étonnant, lui, qui est Dieu, qui en un instant aurait la puissance de détruire l’intégralité de l’humanité, qui nous a donné la vie et nous offre depuis le Christ la vie éternelle… doit demander la permission d’entrer. Il respecte tellement la vierge Marie qu’il lui pose la question : il ne fera rien sans son consentement, il ne fera rien malgré elle, il fera tout avec elle.
Le monde est tout entier suspendu aux lèvres de Marie. Vous savez comme dans ce moment crucial du film où le mouvement de la caméra ralenti, où la parole se fait plus calme pour laisser raisonner dans un silence la salle suspendue à la réponse du héros à la question décisive. Et bien ici c’est Adam, Abraham, Moise, David et finalement nous tous qui supplions Marie de dire oui, d’accepter d’être ce nouveau Temple pour la Gloire divine.
Oui, le nouveau temple de Dieu est un temple de chair, Dieu tout puissant n’a pas pu se faire homme sans le consentement d’une femme, d’une toute jeune femme. « Ne tarde plus, Vierge Marie. Vite, réponds à l’ange, ou plutôt, par l’ange réponds au Seigneur. Réponds une parole et accueille la Parole; prononce la tienne et conçois celle de Dieu ; profère une parole passagère et étreins la Parole éternelle. » « Qu’il me soit fait selon ta parole ». « Et le verbe c’est fait chair et il a habité parmi nous »
Marie, Vierge Immaculée, toi qui à l’ange a répondu oui pour porter le sauveur, aide nous à quelques heures de fêter la nativité de ton fils à accueillir le sauveur dans notre chair, en communiant d’un cœur fidèle à cette Eucharistie, et ouvrant tout grand les portes de notre âme au Rédempteur, lui qui vient pour tout sauver !