Oui : de la tête et du cœur !
Parfois dans notre vie, on aime à dire (à nos parents, à un pote, à notre conjoint) : « oui oui, c’est bon… je le fais », ce qui en réalité veut dire : « bon chéri(e), tu n’as pas compris, mais là je suis concentré(e) sur mon journal ou sur mon compte Facebook pour liker la dernière photo de la page FB de la paroisse… ». Et puis finalement, on finit par faire la chose en question parce qu’on se rend compte que c’est pas idiot, ou bien on le fait simplement par amour de l’autre, mais on le fait, on s’exécute. Ainsi donc l’Évangile d’aujourd’hui nous parle-t-il de l’obéissance.
Un tempérament
« Oui ou non » c’est d’abord une question de tempérament. Vous avez les éternels enthousiastes qui ne parviennent pas à dire non : ce sont eux qui disent toujours oui, mais qui ont parfois du mal à suivre. Et puis il y a les râleurs mode Bourvil dans La Grande Vadrouille… il paraît à ce propos qu’on dit des Français qu’ils sont très râleurs. Ils commencent par dire non… puis se ravisent. Pour peu qu’il y ait un peu d’émotion, de passion ou de fatigue, et les caractères sont plus affirmés et la réaction plus violente. Mais dans l’Évangile d’aujourd’hui Jésus veut d’abord nous montrer que l’obéissance se mesure en fonction de la fin, et non pas en fonction de nos réactions intermédiaires. Il ne suffit pas pour Jésus de mesurer l’enthousiasme ou la générosité des brillants débuts. Je peux dire « oui » avec mon cœur et ma tête… puis dire « non » dans les actes. La vie chrétienne n’est donc pas qu’une question de tempérament entre enthousiastes et râleurs… elle est affaire de liberté, de volonté et d’action !
Écouter
Cette liberté s’engage d’abord dans l’écoute. Car obéir, c’est commencer par écouter. Et il est des moments où l’on n’a pas du tout envie d’écouter. On est plus concentré sur l’achat de notre prochain canapé, ou trop plongé dans la lecture d’un bon magazine… On peut entendre et dire « oui, oui, plus tard » mais ne pas prendre le temps d’écouter, c’est-à-dire de s’arrêter pour consacrer toute notre attention à la chose, à la demande qui nous est faite. Le livre d’Ézéchiel invitait le peuple d’Israël à une écoute plus profonde : « Écoutez, fils d’Israël ». Vis-à-vis du Seigneur à la messe du dimanche, ce peut être la même chose : je peux entendre la parole de Dieu sans vraiment écouter. En pensant à la bière que je vais boire après ? À mon travail à terminer car c’est dimanche soir ? Ou en me morfondant sur ma situation personnelle ?
Choisir
Ensuite cette liberté s’engage dans un choix. Regardons ensemble les deux fils. Il y a celui qui dit « oui, oui » un peu vite et qui ne fait rien. C’est un peu comme nous, lorsque nous avons envie de nous débarrasser rapidement de la question. Je suis en train de regarder ma série préférée : Narcos par exemple. Je vais dire rapidement « oui, oui, j’y vais » pour être débarrassé des sollicitations extérieures qui m’empêchent de regarder ma série, mais en vérité je n’ai pas vraiment choisi d’aller chercher le pain. L’Évangile d’aujourd’hui nous invite à une plus grande cohérence. Sans quoi nous devenons des êtres que le monde pourra discréditer en disant « qu’ils disent mais ne font pas ». Ils disent qu’il faut faire de telle ou telle manière… mais ne le font jamais. C’est tellement courant sur les sujets de société en particulier.
Obéir, c’est donc non seulement entendre ce qu’il faut faire mais encore le faire, et le faire jusqu’au bout. Se mettre en marche. Dans notre vie et dans notre vie chrétienne, il faut se mettre en route, arrêter de tergiverser, go go go ! Et c’est d’ailleurs le plus important pour Jésus. Quel est le fils qui est entré dans la volonté du Père ? Finalement la parabole d’aujourd’hui ne nous dit pas : « dites oui à tout ce qui vous est demandé de faire » mais « faites tout ce qui vous est demandé de faire ». Comme le dit Jésus, à la fin, les prostituées nous précèdent dans le Royaume si elles arrivent à entrer dans cette obéissance des actes.
Contempler le troisième homme
Dans les bonnes élections présidentielles, il y a souvent le fameux « troisième homme. » Eh bien, dans l’Évangile aussi, car nous ne sommes pas condamnés à être éternellement incohérents. Le troisième fils dont on ne parle pas : celui qui dit oui j’y vais… et qui y va ! Saint Paul nous en parle dans la deuxième lecture, à propos du Christ : « Reconnu homme à son aspect, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, et la mort de la croix ». Qu’est-ce que cela veut dire ? Que Jésus, le Christ, le Roi du Ciel, le Seigneur des Seigneurs, Lui-même a choisi d’être obéissant envers son père et de mourir sur la croix, car tel est le plan d’amour de Dieu. Jésus aurait pu dire à son père : « Bon écoute papa, tu es sympa, mais là je suis sur terre donc je fais quelques miracles et pour la croix on repassera plus tard ». Mais si c’était le cas nous ne serions pas sauvés, nous ne serions pas à la messe ensemble ce matin. Jésus, lui, a vraiment écouté son Père dans le secret et il a donné sa vie sur la croix ; il dira même à ses apôtres : « ma nourriture, c’est de faire la volonté de mon père ». Autrement dit : ce qui me donne la joie véritable, ce qui me comble vraiment, c’est d’écouter Dieu et de faire ce qu’il me dit. Jésus, c’est donc le 3ème fils de la parabole dont on ne parle pas : celui qui dit oui et qui y va. Et il doit être pour nous un modèle d’obéissance.
Duc in Altum !
En ce soir le Seigneur vous invite, nous invite à aller à sa vigne… Je vous rassure, nulle question de faire « les vendanges de St Sulpice, cuvée 2020 »… La Vigne dont parle l’Évangile, c’est notre ville, ce sont nos lieux d’études, nos entreprises. Le Père, c’est Dieu qui nous invite à aller annoncer la joie d’être chrétien. Quand nous allons à la messe, nous disons d’une certaine manière : « Oui Seigneur, je veux venir avec toi ». Quand le prêtre à la fin de la messe nous dit : « Allez dans la paix du Christ », cela ne veut pas dire : « Allez dans votre canapé », mais plutôt : « maintenant les gars, au boulot ! ». Alors là oui, je peux dire : bon, tu es gentil, mais là j’ai autre chose à faire, j’ai piscine ou j’ai tennis. Je suis alors le fils de l’Évangile qui dit oui mais qui ne fait pas. Ou bien je peux dire : d’accord, j’y vais. Je vais parler de la joie d’être chrétien autour de moi. Je vais inviter à un groupe de prière, à un afterwork catho, je vais témoigner de ma foi, je vais annoncer l’Évangile. Alors là, oui, je fais ce que Dieu veut. Je vais travailler à sa Vigne.
Seigneur Jésus, toi qui as vraiment écouté ton Père, toi qui nous montres l’exemple en vivant vraiment selon la volonté du Père, donne-nous la joie d’écouter, nous aussi, la Parole de Dieu, de la mettre en pratique et de l’annoncer autour de nous ! Donne-nous de te faire confiance car tu veux notre bonheur et tu nous dis dans l’Évangile que tu es venu pour que nous ayons la joie, et la joie en abondance. Donne-nous donc de dire oui avec la tête et de dire oui avec le cœur pour goûter à la joie de l’obéissance véritable.