Croire ou ne pas croire…

« Croire ou ne pas croire telle est la question ». Ce n’est pas la nouvelle pièce du célèbre dramaturge anglais, mais la question de l’évangile du jour. Et dans la vie chrétienne, nous avons une excuse dorée pour tous nos doutes et toutes nos paresses spirituelles : j’ai nommé Thomas. Avouons-le, il se traîne un boulet depuis 20 siècles… un surnom qui lui colle à la peau : Thomas l’incrédule, Thomas qui doute… Et pour nous dédouaner, nous utilisons même parfois l’expression : «moi, je suis comme saint Thomas, je ne crois que ce que je vois». Finalement, Thomas ne serait pas si saint que ça. Un saint de seconde catégorie, si l’on peut dire. Remarquez même que l’on dit «Thomas l’incrédule» et non «Saint Thomas l’incrédule». Et avouez, frères et sœurs, que ce n’est pas pour nous déplaire. C’est même rassurant, non? Après tout, si même un des Apôtres a douté, je peux bien me permettre un petit -ou gros- doute de temps en temps, non? Et pourtant, Thomas nous est donné comme un exemple à suivre…

Croire, c’est fait confiance à Dieu qui nous veut du bien !

Mais au fond, croire, ça veut dire quoi ? Quand on va au café du commerce on entend ce genre de conversation : « moi je crois qu’il va faire beau tout à l’heure car Evelyne Deylia l’a annoncé sur TF1 », « moi je crois que le PSG gagnera la Ligue des champions l’an prochain », « Moi je crois que mon fils va réussir son bac avec mention…. » Ou encore près de la fenêtre, Côme se penche sur son voisin pour dire : « tu crois que tu vas passer en 1èreS ? » Et bob de lui répondre « Oui bien sûr j’ai consulté une voyante sur internet qui m’a dit que ça devrait passer crème ». A l’autre bout de salle il y a Clarisse qui regarde Louis en disant : « moi je crois qu’il y a un complot mondial et que les extraterrestre vont bientôt débarquer sur la terre » … – ah oui ? – bah j’ai lu ça sur internet, c’est hyper fiable »… Vous vous rendez compte tout de même ce que l’on est capable de croire ? Les sondage, la TV, le premier site internet que l’on regarde… et hop souvent on le croit sur parole. Mais quand il est question de Dieu, combien de fois ai-je entendu « Attendez mon Père, moi je crois que ce que je vois ».  En fait, nous passons notre temps à croire. Nous croyons l’écran de la SNCF qui nous indique que le prochain train ira bien à Paris et non à Marseille, nous croyons notre collègue qui nous dit que la réunion est à 18 h, nous croyons notre épouse qui nous dit « je t’aime ». Car croire, c’est d’abord faire confiance.

Ainsi, pour nous, croire en Dieu, c’est d’abord faire confiance à Dieu. C’est faire confiance à celui qui m’a créé, qui m’a racheté par sa croix et qui m’a donné une vie nouvelle, qui m’ouvre les portes du ciel. Pourquoi faire confiance ? Parce que c’est Dieu qui nous le dit. Parce que même si je me trompe sur la victoire de l’Ajax, Lui, Dieu, ne peut pas me tromper. Parce qu’il est par nature bon et qu’il veut mon bien. Parce qu’il m’a créé par amour. 

Parce qu’aussi, la foi, c’est un don de Dieu. Au jour de notre baptême nous avons reçu dans notre cœur la foi. Et Dieu peut toujours faire grandir en nous la foi si on le lui demande. « Seigneur, augmente en moi la foi ». Parce que la foi est aussi une joie : « heureux celui qui croit sans avoir vu » 

Croire, c’est ce qu’a fait Thomas quand il a reconnu son Sauveur et son Dieu. Il ne dit pas « attend, maintenant tu peux me le prouver scientifiquement ! » Il confesse, il adore, il aime : « mon Seigneur et mon Dieu ». À force d’insister sur son doute, on oublie que Thomas est d’abord un témoin de la foi. Il croit, il va mettre toute sa vie au service de cette foi : croire que Jésus est vivant, et l’annoncer par delà les frontières. L’annoncer jusqu’à donner sa vie aux Indes, comme martyr de la foi. 

Il ont vu pour que nous puissions croire sans voir : c’est ca la miséricorde ! 

« Mon Seigneur et mon Dieu » ! Voilà une des plus belle confession de foi de l’Évangile. 

Cette confession de foi s’appuie en fait sur la miséricorde de Dieu. Dieu sait que nous avons besoin d’élement tangible pour croire. N’est-ce pas Jésus qui leur a dit : « Voyez mes mains et mes pieds ; c’est bien moi ; touchez-moi » ? C’est lui, Jésus qui a voulu que les Onze puissent le voir, le toucher, afin de croire vraiment, en lui, en toute vérité. Alors, voir ou ne pas voir : faut-il vraiment choisir ? Disons plutôt qu’il nous a été bon que les Apôtres voient Jésus, que Thomas demande à voir Jésus, afin que nous, nous puissions croire sans le voir. Si nous pouvons maintenant croire sans voir, c’est parce qu’eux, les Apôtres, ont pu voir pour croire. Leur foi a été oculaire, fondée sur la vision de Jésus ressuscité, afin que nous, après eux, puissions croire sans voir. Nous pouvons maintenant nous appuyer sur leur témoignage, qui est véridique comme nous le dit l’évangéliste : « Jésus a accompli en présence des disciples encore bien d’autres signes, qui ne sont pas relatés dans ce livre. Ceux-là l’ont été pour vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu et qu’en croyant vous ayez la vie en son nom » (Jn 20, 30-31). Jésus lui-même a multiplié les signes que les disciples ont pu voir, afin que notre foi soit solide et véridique, et non évanescente et mythique, laissée à la fantaisie de chacun. La Miséricorde de Dieu va jusque-là et nous offre deux affirmations décisives : d’abord, aucun des Disciples n’a cru sans voir ; ensuite, ce qu’ils ont cru dépasse de beaucoup ce qu’ils ont vu ! Commençons par la seconde, on résume faussement l’attitude de thomas : « je ne crois que je ce que je vois » … . Il a voulu voir l’homme Jésus, le fils du charpentier de Nazareth, devenu prédicateur accomplissant des prodiges, qu’il avait vu mort et qui est bien vivant. Et en voyant cet homme ressuscité, il a pu croire ce qu’il est impossible de voir : cet homme, son maître, n’était rien moins que son Dieu, Dieu lui-même. Autrement dit, la foi dépasse largement ce que l’on voit, y compris pour les Apôtres et les témoins de la résurrection. Reprenons à présent la première affirmation : ils ont tous vu pour croire. Marie-Madeleine voit le Christ mais ne le reconnait pas dans un premier temps, les disciples d’Emmaüs aux aussi, les onze également… Ils ont besoin que Jésus, dans sa miséricorde touche leur cœur. A leur suite, pour nous, croire, c’est laisser notre cœur malade se dilater par la puissance d’amour infini de Jésus. Pourquoi fallait-il qu’ils aient besoin de voir et toucher les marques des clous sur ses mains et le côté de Jésus ? Ce n’est pas d’abord pour les aider à vaincre l’incrédulité, mais -troisième motif- pour garantir la vérité de la foi, la vérité de la mort et de la résurrection de Jésus, Fils de Dieu. Jésus n’est pas fantôme, ni un esprit ; il n’est pas non plus un héros devenu immortel. Il est Dieu qui, dans la vérité de la chair humaine, a assumé la vérité de la mort et de la résurrection. Sa résurrection n’est pas un mythe ; elle est la réalité de l’amour de Dieu incarné dans une vie humaine, crucifié dans un corps humain et ressuscité pour la résurrection de tous les hommes, corps et âme.

La miséricorde de Dieu en ce dimanche se déploie donc de trois manière : d’abord en nous offrant un homme, un saint, Thomas, qui a donné un des plus beau témoignage de la foi qui soit : « Mon Seigneur et mon Dieu ». Ensuite, en donnant aux Apôtres de voir pour pouvoir croire. Enfin pour que cette fois des Apôtres ne reposent pas sur une impression personnelle, mais sur la réalité de la chair ressuscitée de Jésus qu’ils ont touché. Soyons heureux de suivre avec confiance leur témoignage véridique. 

Que le Seigneur nous donne, par sa miséricorde, la joie de croire sans voir, et de nous appuyer avec confiance sur le témoignage de ceux qui ont vu, pour qu’aujourd’hui nous puissions croire.

Jésus, mon Sauveur et mon Dieu, je crois, mais augmente en moi la foi !