Réservation ?

Il y a quelques années lorsque l’on allait au cinéma, il fallait venir longtemps à l’avance pour avoir une bonne place. Désormais, dans les multiplex géants qui peuplent nos contrées, il est possible de réserver à l’avance sa place pour être sûr d’avoir le meilleur fauteuil.

Au pays de l’amour pour faire référence à une chanson récente, nos amis Jacques et Jean eux aussi veulent le meilleur fauteuil. Ils sont à l’école du Christ depuis plusieurs années et l’heure est venue de faire valoir leur compétence. Bien que Jésus vienne d’annoncer à tous sa Passion, ils veulent une promotion pour être tout proche du Christ. Peut-être même plus proche que Pierre, le chouchou du Seigneur. Ils veulent siéger à droite et à gauche du Christ dans la gloire.

N’est-ce pas une belle ambition ? ils veulent le bien de leur pays, et la réussite de Jésus. D’ailleurs, Jésus ne s’offusque pas de leur demande contrairement aux autres apôtres qui jasent par derrière. Le Seigneur se contente de leur demander ce qu’ils sont prêts à faire pour lui. Il vient d’annoncer sa Passion il leur demande donc, êtes-vous prêts à me suivre jusque la croix ?

Cette question, Jésus nous la pose également. En effet, être marqué par l’onction du Saint Chrême c’est porter la marque de la croix.

Jésus n’est pas un super héros. Il ne ressemble pas à Capitain’America ou Super Man sur qui les balles et les coups n’ont aucun effet. Jésus a souffert sur la croix. La lettre aux Hébreux nous l’a redit il y a un instant : « Le grand prêtre que nous avons n’est pas incapable, lui de partager nos faiblesses ; en toutes choses, il a connu l’épreuve comme nous ».  Et c’est une bonne nouvelle pour nous. Si nous avions un sauveur super héros, dans nos souffrances, dans nos échecs, dans nos blessures de familles, lorsque les situations de la vie nous bouleversent et nous déstabilisent,  nous serions bien seuls. La première bonne nouvelle de ce jour, c’est que nous avons un Sauveur, le Christ, capable de nous comprendre car « il a connu l’épreuve comme nous ».  A Jacques et Jean qui veulent réserver une place d’honneur, Jésus offre une place sur la croix, mais non pas seul, avec lui, à ses côtés.  Dans les temps de détresse et d’angoisse, dans la souffrance ou la tristesse, dans l’inquiétude et la peur c’est une prière que nous pouvons faire : « fais que je marche, Seigneur, aussi dur que soit le chemin, je veux te suivre jusqu’à la croix : viens me prendre par la main. »

Mais le Christ nous offre en ce dimanche un second conseil pour réserver une bonne place à ses cotés à la suite de Jacques et Jean. Se faire le serviteur de tous. La vraie grandeur, nous dit Jésus, consiste à servir. Comprenons bien: Jésus ne dit pas «remplacez votre appétit de grandeur par le désir de servir», mais bien «la vraie nature de la grandeur que vous désirez ne consiste dans rien d’autre que le service». Il n’y en a jamais eu d’autre que celle-là. Tout le reste est grandeur illusoire.

Dans la Bible le Seigneur ne cesse de se mettre lui-même au service : n’est-ce pas lui qui disposa les arbres du jardin au service des hommes ? n’est-ce pas lui qui après le péché s’improvise couturier pour faire un vêtement à Adam ? N’est-ce pas lui qui au désert se fait boulanger pour donner à manger à son peuple ? N’est-ce pas lui qui la veille de sa Passion prend le tablier de serviteur pour laver les pieds de ses disciples ?

Tous les dirigeants des chaînes hôtelières ont fini par comprendre que ce qui leur permet de s’étendre toujours plus, c’est la qualité de leur service. Plus leur service sera clean, plus ils seront des professionnels du service, plus ils auront des clients. Jésus invite donc, en bon dirigeant, ses cadres dynamiques à porter l’accent sur la qualité de leur service: Celui qui voudra devenir grand, se fera serviteur. Parce que servir, c’est donner de sa personne. C’est cela qui fait l’âme grande.

Or cette grandeur là, n’imaginons pas qu’elle serait réservée aux grands de ce monde ou aux saints telle sainte Theresa de Calcutta. Elle se manifeste chez l’homme ou la femme qui se dévoue sans compter pour son conjoint malade, chez les parents qui remuent ciel et terre pour rendre heureux leur enfant handicapé. On la trouve aussi chez l’infirmière harassée de travail et qui pourtant trouve encore l’énergie de réconforter un malade qui a peur de mourir, chez le professeur de collège qui lutte pied à pied pour sortir un élève d’une situation d’échec scolaire. Mais elle resplendit, ô combien, chez la personne âgée ou chez le contemplatif qui apparemment ne peut plus servir personne mais qui en fait porte dans sa prière le souci du salut du monde.

Alors frères et sœurs bien aimés, confiants jusqu’à l’extrême en la bonté de Dieu demandons à Jésus la force de porter notre croix avec lui chaque jour sans nous décourager et de ne jamais oublier que la véritable grandeur c’est d’être serviteur.