La foi du Charbonnier ?

« Ce que tu as caché aux sages et aux savant, tu l’as révélé aux tout petits » faudrait il comprendre alors que pour être un bon chrétien il faut être un bon ignorant. Pour les plus anciens d’entre nous ont souvent entendu parlé du concept de la « foi du charbonnier ». Le charbonnier est un homme simple, un « petit » pour qui la foi en Dieu est une évidence, une foi simplement pensée, simplement vécue… Pourtant ici, personne n’est charbonnier car c’est un métier qui se perd.

Le charbonnier lui sait bien son catéchisme… non défintivement c’est un métier qui se perd. La vraie question liée à la foi du Charbonnier c’est de savoir si l’Evangile d’aujourd’hui nous autorise ou non à être des ignorants. Faut il comprendre la petite phrase de Jésus comme la permission d’oublier ce que nous avons ou pas appris au catéchisme, de mettre au rebus loin dans notre bibliothèque les livres spirituels sous pretexte qu’il faudrait être petit ? Et par la même mettre renvoyer à Pôle emploi les professeurs de séminaire, les théologiens et autres spécialiste de l’écriture sainte…

La réponse vous l’avez compris est bien évidemment non. Lorsque Jésus parle de tout petit il ne désigne pas les enfants, ou plutôt si, il parle de l’enfance spirituelle. Et Jésus ne se réjouis pas d’abord que nous portions des couches ou que fassions des bétises. Il se réjouis d’abord de ce que nous soyons dans les mêmes dispositions de foi que les enfants : a priori il font confiance à la parole de leur parent. Finalement ils ont peu de difficulté à faire un acte de foi. Il adhère par principe en pensant que ce que l’autre dit est vrai. Nous pourrions en prendre de la graine non pour oublier de raisonner mais pour que le premier mouvement de notre âme lorsque nous entendons la parole de Dieu soit d’abord un mouvement d’accueil et de joie.

Pourtant comme des enfants notre foi est appelée à grandir. Si au départ elle ressemble plus à une graine de moutarde ce n’est pas pour autant qu’elle doit demeurer faible et petite. La graine de moutarne à laquelle Jésus compare notre fois peu devenir une véritable plante potagère d’importance à condition de la faire grandir comme on fait grandir une relation d’Amour.

Alors être petit quand à la foi, c’est faire confiance d’abord au Seigneur. Dans un témoignange j’entendais un jour un prêtre dire à un jeune un peu tourmenté : « maintenant tu vas arrêter de croire à tes doutes et de douter de ta foi, tu vas croire à ta foi et douter de tes doutes ». Mais c’est aussi avoir conscience qu’elle doit grandir pour devenir une belle plante. Elle doit être nourrie. L’été approche et je peux me demander : quel livre ai je choisis pour grandir dans la foi cet été ? Comment fais je la nourrir ? Quelle conférence estivale vais je pouvoir écouter ?

Si la foi du Charbonnier le dispose à croire, à faire confiance à Dieu d’une manière simple et pure… notre bon charbonnier pour être un de ces petits dont Jésus loue l’attitude doit surtout aimer Dieu.

C’est dans l’ordre de l’Amour que la petitesse est la plus perceptible. On raconte qu’un jour, le Général De Gaulle, dans un trait d’humour, avait déposé dans la creche de l’Eglise, un petit mot : « du grand Charles au petit Jésus ». Le trait d’humour nous fait sourir mais pourtant il nous faut parfois remettre les choses à leur juste place. Qui de Dieu ou de nous nous a aimé le premier ? Est-ce que nous pensons parfois à lui rendre grâce pour le don de la vie qu’il nous fait ? Est-ce qu’à la manière d’un enfant nous disons « Seigneur, je t’aime » ? Simplement dans un acte d’amour gratuit ?

Plus fondalement être un petit dans l’ordre de l’Amour c’est comprendre que si je suis capable d’aimer ce n’est que parce que Dieu m’a aimé le premier. Souvent on peut dire dans la confession : j’ai du mal à aimer telle personne. Mais est-ce que l’on se laisse vraiment aimer par Dieu ? Est-ce que l’on tire de l’Eucharistie les forces de la semaine pour aimer notre collège de travail pénible, notre ado qui vient de rater son bac, notre époux ou notre épouse un peu acariâtre en ce moment ? Il faut être réaliste, tout seul je ne peux pas aimer vraiment. Nous sommes dans l’ordre de l’amour comme le petit enfant qui apprend à faire des Lego. Je le faisais jeudi soir avec mon neveu : il faut l’aider, l’assister.  Notre charité vis à vis des autres ne pourra grandir que si l’on s’appuie vraiment sur le cœur de Jésus : « je suis doux et humble de cœur ». Comment pourrions aquérir ces deux vertus si importante dans notre vie relationnelle si nous ne venons pas les mendier auprès du maitre qui les possède en plénitude ?

Enfin l’Evangile d’aujourd’hui nous pousse à l’Espérance. « Mon joug est facile et mon fardeau léger » « je vous procurerai le repos ». L’Espérance c’est peut être la vertu théologale où nous sommes le plus facilement petit. Nous sommes tant désemparé face à la mort d’un de nos proches, angoissés parfois vis à vis de l’avenir. Et il ne faut pas confondre ici l’espoir d’un avenir humain meilleur, j’ai l’espoir d’avoir enfin ce meilleur job… et ce que nous attendons dans l’espérance : un ciel nouveau et une terre nouvelle. Notre espérance nous rend petit et libre. Elle rend petit car elle abaisse l’illusion de conduire tout par nous même. Elle rend libre car elle établie la vérité d’une situation où Dieu fait tout en nous avec nous si nous le voulons bien. Dieu n’agit pas, ne nous sauve pas sans nous, mais avec nous.

Alors revenu à notre petit charbonnier : où bien notre petit charbonnier est pénétré profondément de la foi, de l’espérance et de la charité : il fais confiance à Dieu d’un amour vrai, il espère fermement voir le Seigneur face à face et il apprends à aimer d’un amour que Dieu lui donne dans la prière… ou bien il est simplement un ignorant coupable, comblé de péché, croupissant de désespérance, et sa petitesse ne respire que la mort.

Il est une sainte qui avait compris cette attitude spirituelle. C’est Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus. Je l’aime beaucoup. Elle a vecu à la fin du 19ème siècle dans une époque où l’éducation religieuse et humaine n’étais pas vraiment porté sur la tendresse. Elle déclare :

« j’ai toujours désiré d’être une sainte, mais, hélas ! j’ai toujours constaté, lorsque je me suis comparée aux saints, qu’il y a entre eux et moi la même différence qu’il existe entre une montagne dont le sommet se perd dans les cieux et le grain de sable obscur foulé sous les pieds des passants ; au lieu de me décourager, je me suis dit : Le Bon Dieu ne saurait inspirer des désirs irréalisables je puis donc malgré ma petitesse aspirer à la sainteté ; me grandir, c’est impossible, je dois me supporter telle que je suis avec toutes mes imperfections ; mais je veux chercher le moyen d’aller au Ciel par une petite voie bien droite, bien courte, une petite voie toute nouvelle. Nous sommes dans un siècle d’inventions, maintenant ce n’est plus la peine de gravir les marches d’un escalier, chez les riches un ascenseur le remplace avantageusement. Moi je voudrais aussi trouver un ascenseur pour m’élever jusqu’à Jésus, car je suis trop petite pour monter le rude escalier de la perfection. Alors j’ai recherché dans les livres saints l’indication de l’ascenseur, objet de mon désir et j’ai lu ces mots sortis de la bouche de la Sagesse Eternelle : «  Si quelqu’un est tout petit qu’il vienne à moi ». Alors je suis venue, devinant que j’avais trouvé ce que je cherchais et voulant savoir, ô mon Dieu ! ce que vous feriez au tout petit qui répondrait à votre appel, j’ai continué mes recherches et voici ce que j’ai trouvé : « Comme une mère caresse son enfant, ainsi je vous consolerai, je vous porterai sur mon sein et je vous bercerai sur mes genoux ! » (Isaïe LXVI 13). Je désire accomplir parfaitement votre volonté et arriver au degré de gloire que vous m’avez préparé dans votre royaume, en un mot, je désire être sainte, mais je sens mon impuissance et je vous demande, ô mon Dieu ! d’être vous-même ma sainteté »

Puisse Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus nous apprendre à demeurer humble et petit devant le Seigneur pour grandir dans la foi, l’espérance et l’amour !

Amen !