N’ayez pas peur !

Je suis sûr qu’un grand nombre d’entre vous ont lu ou vu la série Harry Potter. Et il me semble intéressant de relever avec vous un détail. Souvenez-vous quelle est la plus grande peur d’Harry ? … je vous laisse 3 secondes pour réfléchir… la mort ? non pas vraiment il passe son temps à la braver ! l’interdit de l’école… là non plus … Voldemort … oui et non tant il joue au chat et à la souris avec lui… non se sont les détraqueurs. Sorte de fantômes, gardiens de la célèbre prison d’Askaban qui par un baiser de leur bouche « aspirent » littéralement votre âme vous laissant dans un état végétatif presque pire que la mort.

Qu’est-ce qui est vraiment important à nos yeux ? et quel est le plus grave ?

Dans l’Evangile d’aujourd’hui le Seigneur nous invite précisément à réfléchir à ce qu’il convient de craindre véritablement. Imaginons le petit sondage dans l’assemblée… « J’ai peur que Germaine me mette un vent à la sortie du lycée quand je lui demanderai de sortir avec elle »… « j’ai  peur  que mon fils rate son concours et ne puisse pas intégrer HEC du premier coup » « j’ai peur de pas être pris dans la filière internationalle, option stage à l’étranger et voyage entre potes en Asie » « j’ai peur de devoir rater la prochaine soirée de rallye parce que mes parents veulent absolument partir à la campagne ». Ou pour les plus spirituels d’entre nous : « mon père, mon père, j’ai tellement peur que le Seigneur me demande de devenir prêtre… ou encore pire bonne sœur… vous imaginez mon père, moi bonne sœur… ». Nota bene, on peut transposer ces craintes à tout âge…

Ce qui est amusant c’est que ni Harry Potter ni Jésus ne nous parle de ces craintes là… ou plutôt si mais en nous disant l’un comme l’autre : « Ne craignez pas ceux qui tuent le corps sans pouvoir tuer l’âme ; craignez plutôt celui qui peut faire périr dans la géhenne l’âme aussi bien que le corps ». Qu’est-ce qui tue l’âme frère et sœurs…. C’est notre péché. C’est ce dont parle Saint Paul dans 2ème lecture. « le péché est entré dans le monde et par le péché est venue la mort ». Et de fait, entre ces deux là… péché et mort il y a une grande affinité.

Pécher c’est mourir ! Vous me direz là… il est gentil le jeune prêtre… enfin quand même parler de mort à St Ferdinand pour une messe des jeunes du dimanche soir c’est pas très vendeur. Niveau marketing on a vu mieux… Et pourtant c’est une réalité ! Un péché c’est quoi ? c’est une blessure du lien d’amour avec Dieu, c’est un baiser du détraqueur. Avons nous vraiment conscience de ces blessures auxquelles nous nous habituons parfois… Je pense à tous ces jeunes que j’ai rencontré qui sont esclaves de leur sexualité avec leur copain/copine ou de la pornographie même s’ils se pensent parfois très libérés. Je pense à ces soirées étudiantes où l’objectif avoué ou non est de terminé ivre… Je pense à ces mots blessants ou médisants par lequel il nous arrive de considérer nos frères différents ou nos collègues de bureau… Je pense aussi à toutes les fois où nous préférons notre confort et notre repos à la messe ou à la prière. Toutes ces situations font mourir l’âme car elle nous éloigne de Dieu.

Un patronus en forme de Croix

On pourrait facilement se désespérer si on en restait à ces morts de nos vies, à ces combats qui nous empoisonnent. Ce serait pour notre ami Harry Potter comme rester devant le détraqueur à se laisser aspirer l’âme sans rien faire. Pour Harry  Potter la défense contre ces forces obscures c’est le Patronus. Un Patronus une sorte de puissance de lumière qui  fait fuir le détraqueur…

Pour notre frères et sœurs bien aimé, notre Patronus est en forme de Croix : c’est le Christ ! Là encore Saint Paul nous éclaire : « elle s’est-elle répandue en abondance sur la multitude, cette grâce qui est donnée en un seul homme, Jésus Christ ». Dans ce combat nous avons donc une arme de choix ! Le Christ ! Car c’est un combat que nous avons à vivre chers amis, pas d’abord contre les autres, mais d’abord contre l’esprit du mal qui agite nos cœurs, qui s’insinue dans nos vies. L’Evangile d’aujourd’hui nous invite à la fois à examiner notre conscience, à faire le point : où est-ce que j’en suis dans ma vie… Ne faudrait il pas que j’aille me mettre à genoux devant un prêtre pour recevoir le pardon de Dieu ? Depuis combien de temps ne me suis-je pas confessé ? ai-je des péchés récurant ? En ai-je déjà parlé à un prêtre de ce qui me mine depuis longtemps, de ce que je n’ai jamais osé confessé ? Et à la fois, Jésus nous invite à nous appuyer plus pleinement sur sa grâce dans le combat : c’est Lui qui est notre force. C’est Lui qui me donne de grandir dans la chasteté, dans la vérité, dans la simplicité, dans la sainteté !

J’en suis persuadé, car je l’ai vécu, si vous vous appuyez sur le Seigneur vous ne serez pas décu ! Ne craignez pas ! Priez ! Confessez vous !  « Pas un seul cheveux de votre tête ne sera perdu »… si vous vous appuyez sur Lui… pas sur vous ou vos propres ambitions. Vous trouverez la joie et la vie véritable !

Saint Ferdinand a été pour moi un « ne craignez pas » !

« Ne craignez pas » c’est ce que j’ai entendu dans cette église pendant plusieurs années, dans le secret de mon cœur. Comme vous pouvez vous en douter, c’est pour moi une grande émotion de célébrer la messe dans cette église au lendemain de mon ordination. Permettez-moi donc un petit témoignage. J’avais le désir d’être prêtre depuis l’âge du lycée, où le Seigneur avait touché mon cœur à la fois dans la prière personnelle et par des rencontres. Lorsque je suis arrivé à Saint Ferdinand, j’étais un étudiant de 18 ans  et je pensais déjà  au sacerdoce

Ce désir grandissait dans mon âme et ce sont les prêtres et les fidèles de cette paroisse qui sans le savoir ont permis qu’il puisse éclore. Quand on se pose la question d’être prêtre, le célibat, la chasteté, la solitude sont des choses qui vous interroge… Dans mon chemin je me suis parfois rêvé diacre permanent pour être « un peu prêtre quand même… » tout en étant marié, mais au fond c’était fuir mon bonheur véritable. C’était difficile de franchir le pas, de me décider, de dire « oui Seigneur, je viens ». Mais l’amitié des prêtres, le fait de les voir chaque jour se donner aux paroissiens, leur manière de célébrer la messe et de prier a été pour moi un premier « ne crains pas » « appuis toi sur moi, je prendrai soin de toi » ! Le service de la messe aussi car j’y ai appris à gouter la joie de la prière liturgique. Les paroissiens enfin l’ont été : par leur implication fidèle dans la paroisse, par le fait que Saint Ferdinand est comme une « grande famille » où l’Église du Christ m’est petit-à-petit apparue comme une épouse à aimer et qu’il était possible de se laisser aimer par elle.  Finalement j’ai compris, par la messe à laquelle j’assistais souvent dans la petite chapelle du Saint Sacrement, aujourd’hui disparue, que ce n’était pas sur mes propres forces que je devais m’appuyer mais sur la grâce de Dieu. J’ai compris que le Seigneur m’invitait à ne pas avoir peur de sa volonté.  Que c’était pour moi un chemin de joie ! Un chemin de vie ! J’aimerai en rendre grâce avec vous aujourd’hui.

« Soyez donc sans crainte »

Alors frères et sœurs bien aimés, et spécialement les plus jeunes d’entre nous. Je vous en supplie, vivement et humblement. « Soyez sans crainte, vous valez mieux qu’une multitude de moineaux » ! N’ayez pas peur de vous engager joyeusement dans le combat de la sainteté. Le monde dans lequel nous vivons n’est pas peut être pas très facile pour un chrétien car il y a de multiple propositions contradictoires, parce que les tentations s’affiche sur les murs du métro, sur mon smartphone ou à la TV. Parce que « tout le monde vit autrement », parce que si je vis comme un chrétien je risque de passer pour un looser ou un coincé. Parce que si je fais pas polytechnique ou HEC ma vie est ratée… mais vous voyez bien ce sont des préoccupations bien terre à terre.

Ce dimanche, le Seigneur nous invite vraiment à être des saints, des saints ! et des saints martyrs ! C’est ce que Saint Jean Paul II disait aux jeunes réunis à Rome en 2000 « chers jeunes … nous avons tous la vocation au martyr, ce ne sera pas forcement le martyr sanglant des premiers siècles… mais le martyr de la fidélité à contre courant ». Car oui c’est difficile d’être vraiment chrétien mais c’est tellement beau ! N’ayez pas peur d’avancer vraiment avec le Seigneur, de tout lui lâcher. « Celui qui fait entrer le Christ ne perd rien, rien, absolument rien de ce qui rend la vie libre, belle et grande ! Non ! ». Pas un seul instant je ne regrette la choix que j’ai fait à 16 ans d’être chrétien vraiment, pleinement, de désirer être un saint ! J’ai rencontré depuis plusieurs années un grand nombre de chrétiens, jeunes et adultes qui ont voulu faire ce choix, radical de suivre Jésus dans leur vie d’ado, d’étudiants, de parents. Et bien je peux vous le dire…ils sont 10 fois plus heureux aujourd’hui qu’avant. Même à 40 ou 50 ans c’est possible de faire ce choix, il n’est jamais trop tard. N’ayez pas peur du Christ ! C’est seulement dans le lien avec lui, dans la prière, dans le don de vous-même que vous pourrez déployer une vie belle et grande.

Et si le Seigneur touche un jour votre cœur en vous appelant à vous donner tout entier pour l’Eglise et le monde comme prêtre ou religieuse, je vous en supplie, n’ayez pas peur ! C’est tellement beau de pouvoir donner la vie de Dieu aux hommes, de leur donner le pardon et la paix au nom de Dieu ! Alors pour reprendre les mots de Benoit XVI au jour inaugural de son pontificat j’aimerai vous dire, chers frères et sœurs : « Dans l’amitié  avec le Christ seulement nous faisons l’expérience de ce qui est beau et de ce qui libère. Ainsi, aujourd’hui, je voudrais, avec une grande force et une grande conviction, vous dire, à vous les jeunes: n’ayez pas peur du Christ ! Il n’enlève rien et il donne tout. Celui qui se donne à lui reçoit le centuple. Oui, ouvrez, ouvrez tout grand les portes au Christ – et vous trouverez la vraie vie. »[1]

Amen.

[1] Benoit XVI, Messe d’Inauguration du Pontificat,  24 avril 2005