4 mariages pour une cruche de vin
Il est 18 h sur TV Galilée, c’est l’heure du célèbre programme « Quatre mariages pour une cruche de vin ». Le principe de l’émission est simple : 4 couples s’affrontent pour le meilleur mariage et gagner… une cruche de vin. Bethsabée, qui regarde l’émission avec David, son fiancé, se dit que c’est vraiment mal barré pour le couple d’aujourd’hui. Ils ont organisé leur mariage à Cana, de Galilée. Et ils ont invité tout le village. Dans la plus pure tradition des juifs, il y a du vin. Mais tout à l’heure, il s’est passé un truc dingue : plus de vin. Panne sèche. Bethsabée se dit que, décidément, ils n’ont aucune chance de remporter la semaine. Manque de vin au milieu du mariage… c’est la catastrophe… quelles notes vont pouvoir mettre les autres candidats? Cependant, c’est sans compter sur l’intervention de la petite dame un peu discrète, habillée d’une jolie robe bleue, et de son fils : un certain Jésus, que nos téléspectateurs trouvent un peu bizarre, car il ne dit pas grand-chose. Plus de vin : que va-t-il se passer? Alors que le suspense est à son comble : c’est l’heure de la page de pub.
À cet instant, vous vous dites que la providence fait bien les choses, car nous avons des lectures qui devraient un peu raisonner dans le cœur des fiancés de ce dimanche. Alors bien sûr, je ne vous souhaite pas de manquer de vin, mais je peux d’ores et déjà vous dire que, même si vous invitez -et c’est bien de le faire !- le prêtre qui va vous marier à la réception de votre mariage… il ne changera pas des litres de Badoit en litres de grand cru d’exception -enfin, à priori.
Pendant le temps de la pub, David s’est un peu assoupi. Il faut avouer que le programme ne le passionne pas. Dans son sommeil, il fait un songe et rencontre le Seigneur Jésus. D’abord interloqué, il finit par lui demander :
- « Seigneur, y a un truc que je comprends pas, pourquoi donc faut-il que tu commences ta vie publique par un mariage ? N’aurais-tu pas pu assister à un match de foot, genre Jerusalem Saint Germain contre Olympique Bethléemien ?
Tout commence par une histoire d’amour
- Hé David, en fait, j’adore les mariages. Souviens-toi un peu de la Bible que tu lisais quand tu étais petit au caté, à la paroisse de Melun. Qui, à l’origine, a fait tomber sur Adam une mystérieuse torpeur (Gn 2, 21) ? Qui, pendant son sommeil, a façonné pour lui la femme, afin qu’elle soit son aide, assortie entre toutes (Gn 2, 20), sa compagne des bons et des mauvais jours? Qui, fier comme un pape, a conduit Eve vers Adam ? Qui lui a dit solennellement : « l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme et tous deux ne feront plus qu’une seule chair » ? Et qui, depuis lors, de génération en génération, par des chemins connus de lui seul, conduit l’un vers l’autre, l’homme et la femme qui sont destinés l’un à l’autre?
- Euh, permets-moi de t’interrompre Seigneur mais ça, c’est le tout début de la Bible… ça date un peu, tu as pas un truc plus récent là ?
- Si j’y viens, qui est-ce qui a conduit Rébecca vers Isaac ? Qui a fait se rencontrer Sarah et Tobie…Il y a même tout un livre de la Bible qui raconte cela. Te rends-tu compte, tout un livre qui ne parle que de la perspective d’un mariage?
- Bon, d’accord. Mais au-delà de cela, franchement, entre un mariage foireux et un bon match de foot… fallait pas préférer le foot quand même ? Ça aurait rejoint plus de monde, non?
A cet instant, Bethsabée tape sur l’épaule de son fiancé en lui disant : réveille-toi chéri, c’est le moment de noter l’avis sur le repas… tu penses, cette histoire de vin, ça va leur porter préjudice. Et pour notre mariage, tu as pensé au vin?
Fatigué par sa journée au travail David se rendort et retourne à son songe…
Le vin de l’amour ne peut couler que si l’on s’appuie sur Dieu
- Tu sais, David, moi, ma spécialité dans les mariages, c’est le vin. Le vin des noces. Regarde l’histoire de Cana. Les époux ont apporté leur propre vin, ce n’est pas du Saint Estèphe ou du Saint Emillion, mais c’est du bon vin quand même, c’est le vin de leur amour humain. Ils l’ont laissé vieillir dans de belles cuves depuis plusieurs années, comme toi qui connaît Bethsabée depuis plusieurs années. Mais ce vin-là, si bon soit-il, n’est pas inépuisable. S’il n’est pas soutenu, renouvelé, transfiguré par un amour qui vient de plus loin, de plus haut, il risque de s’épuiser, ou pire, de tourner au vinaigre. « Ils n’ont plus de vin », constate Marie à Cana.
- Oui je comprends, Seigneur, ce trésor de l’amour. On le porte comme dans des vases d’argiles, dans des cœurs blessés par le péché. Et sans cesse, nous sommes tentés de n’en faire qu’à notre tête, d’être égoïste. L’amour, tu le sais Seigneur, je l’ai déjà constaté : c’est une flamme fragile.
- Le vin que j’apporte au mariage c’est le vin de l’Amour Divin. Mon cher David, tu serais incapable d’aimer si moi, Dieu le premier, je ne t’avais pas aimé. Tu connais peut être la chanson « Aimer c’est ce qu’il y a de plus beau, Aimer c’est monter si haut… ». Eh bien aujourd’hui, comme nous sommes tous les deux, je peux te le dire. Aimer ce n’est pas « toucher les ailes des oiseaux ». Aimer, c’est toucher les ailes des anges -ou même mieux, c’est faire ce que moi, Dieu, je fais le mieux. Quand toi, mon cher David, tu aimes, eh bien c’est moi qui, en réalité, te donne d’Aimer. Le vin de ton amour serait vraiment de la piquette si moi, Dieu, je ne t’avais pas donné le vin de mon Amour. Depuis le jour de ton baptême je te le dis « tu es mon fils bien aimé, en toi j’ai mis tout mon amour ». Mon cœur est débordant d’amour pour le monde : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a envoyé son Fils pour nous sauver »
- Je comprends, Seigneur, tu veux dire que si j’aime Bethsabée, c’est parce que toi Seigneur, toi le spécialiste intergalactique du mariage, tu m’as aimé le premier, et que depuis que je suis né, tu m’aimes d’un amour infini.
Pendant ce temps là, Bethsabée est toujours captivée par l’émission, et commence à être agacée de voir son fiancé roupiller dans le canapé -d’autant qu’ils sont chez ses parents. Quelle image il donne à maman? Hop, donnons-lui un coup de coude : « Réveille-toi David ! Ils sont en train de mettre les notes du mariages à Cana! Visiblement, le coup du vin, ça a marché, je n’ai jamais vu des notes pareilles : 10 sur 10 ! Je crois qu’il les a un peu enivrés quand même.
Le mariage du Christ et de l’Église : la messe.
Rien à faire, la journée au comptoir de vente d’article du lac de Tibériade l’a épuisé. Et il retourne à son songe.
- « Mais au fait, Seigneur, tu ne m’as toujours pas dit : pourquoi mariage plutôt que foot? »
- Mon fils, tu es bien pressé. En fait, la vie avec moi, c’est une longue histoire d’amour. Souvent, les chrétiens ont du mal à comprendre qu’être chrétien, c’est en fait vivre une histoire d’amour avec Dieu. Commencer ma vie par un mariage, c’est les aider à comprendre qu’avec Dieu, comme dans le mariage, il est question d’amour, de don, de pardon et de joie. Et puis tu vois, dans l’Evangile de Saint Jean dont l’histoire de Cana est tirée, il faut bien comprendre que ce premier mariage n’est qu’un prélude. Moi, Jésus, je me marie aussi dans l’affaire, non?
- « Alors franchement Jésus, là je veux bien, mais tout le monde sait que tu étais célibataire, y a que le Da Vinci Code pour nous faire croire que tu as épousé Marie-Madeleine »
- « Laisse de côté Marie-Madeleine, c’est vraiment ridicule. Non, j’épouse l’humanité. Moi Dieu, j’ai choisi de vivre un véritable festin des noces. D’ailleurs à la messe tu l’entends le dimanche : « Heureux les invités au festin des noces de l’Agneau ». Car ton mariage à toi ne sera qu’un pâle reflet de mon mariage à moi. Le jour de ton mariage tu diras « je me donne à toi pour t’aimer fidèlement » et bien moi, mon cher enfant, je me suis donné tout entier. Et je me suis donné sur la croix. J’ai épousé l’Eglise, d’une manière parfaite et belle : c’est la plus belle des épouses. D’ailleurs quand tu vas à la messe tu entends le prêtre dire pour moi « ceci est mon corps livré pour vous ». Eh bien ce corps que je te donne sur la croix, et que je te donne dans la communion : c’est la preuve que je veux vivre avec toi une union belle et grande. Tu sais, mon cher enfant, quand tu aimes ta fiancée, tu t’entraînes à aimer plus parfaitement encore, à aimer pour toujours, et tout entier. Et c’est beau !
Mon amour, mon amour ! Enfin réveille-toi ! Ils proclament les résultats … et c’est le mariage à Cana qui gagne la cruche de vin dorée. Bien sûr ma chérie ! À Cana, Jésus nous a révélé qu’il était le véritable Seigneur des Anneaux, l’inventeur du mariage. Que sans lui, le vin de l’amour serait bien fade. Que fonder sa vie d’amour sur le Seigneur, c’était un placement sûr et bon. Alors oui, je n’avais aucun doute là-dessus.